Dig It! # 52
Barrence Whitfield
Subsonic (Interview avec Sylvie et Marc)
Off The Hip
BARRENCE WHITFIELD & THE SAVAGES
SAVAGE KINGS
Munster Rds (LP/CD)
Après l'album du retour sur Blood Red Vinyl en 2009 (Raw, Raw,
Rough) et le single "Built Like A Rock"/"I Love Her So" chez Q-Dee Rds
avec les Monkey Hips de Memphis l'an dernier, Barrence Whitfield, de
son vrai nom... Barry White, musicologue averti et conférencier
couru, érudit propriétaire d'une respectable collection
de disques et screamer infatigable depuis des lustres (36 ans de
carrière - il en a 56), sort un nouvel album (Savage Kings),
cette fois en compagnie de ses Savages quasi estampillés
"d'origine". Et comme c'est Munster Rds qui régale pour l'Europe
(Shake It Rds aux USA), on peut opter pour un des 600 exemplaires en
vinyle édités en plus du CD digipack.
Dédié au label King Rds de Cincinnati, le nouvel album,
que les Bostoniens sont donc logiquement allés enregistrer
à Cincy, sonne parfois comme du Lyres grand cru avec Big
Barrence dans le rôle de Monoman. C'est particulièrement
notable sur les grands moments de soul que sont les reprises
chauffées à blanc du "Bad Girl" de Lee Moses ou de "You
Told A Lie" (Johnny Sayles, ou "Sails"). Normal sans doute, puisqu'on y
retrouve deux ex-Lyres, Phil Lenker et Peter Greenberg,
également piliers porteurs de la maison Customs et
déjà aux côtés de Barrence dès le
début de l'histoire avec The Savages en 84. L'organiste, James
Cole, est aussi un ancien Customs, c'est d'ailleurs lui qui a
écrit leur fameux "Long Gone" (il est parti fonder The
Auburnaires plus tard). Du coup, le souffle est magistralement garage
(c'est Greenberg qui produit), à deux doigts des Sonics de 65,
effet renforcé par l'adjonction d'un saxophoniste
pétaradant, Tommy Quartulli, emprunté aux punk rockers
pochetrons de Boston, The Kings Of Nuthin'. Quant au batteur, Andy
Jody, ex-Shams, il accompagne également ces temps-ci le Reverend
James Leg, alias John Wesley Myers, l'homme des Black Diamond Heavies,
et fait partie des Long Gones de Cincinnati avec Greenberg.
L'étincelle à l'origine de cette reformation inattendue
s'est produite quand le label Ace Rds a demandé à
Greenberg de remasteriser le premier album de B. Whitfield & The
Savages paru à l'origine en 84 chez Mamou Rds, en vue d'une
réédition pour 2010 (avec dix bonus tracks). Le
guitariste s'y est collé illico et a demandé à
Barrence de passer donner son avis à l'occasion. Peter Greenberg
: "Et là, en écoutant le disque, il s'est produit quelque
chose, on a ressenti la même chose au même moment... du
genre "faut vraiment qu'on remette ça !"
Et ils ont donc remis ça, avec cet album bien chargé en
reprises, huit sur douze. Un peu beaucoup sans doute, mais à
part "Ramblin' Rose" (qui figurait déjà en version live
sur l'album Savage Tracks) et le "Shot Down" des Sonics ou "It's Mighty
Crazy" de Lightnin' Slim (découvert dans les garages à
travers la version qu'en firent les Cramps sur le EP Blues Fix de 92),
les autres covers ne sont pas du genre à vous tomber entre les
oreilles à chaque coin de rue. De l'obscur
millésimé et donc soigneusement
sélectionné. Comme ce "Just Moved In", rhythm'n'blues
trépidant (donc rock'nroll) de Orangie Ray Hubbard, natif du
Kentucky, un titre tellement obscur d'ailleurs que personne ne semble
s'accorder sur la date de sortie de l'original. Situons le vers 1959 et
on ne sera sans doute pas loin du compte. Sur la version des Savages,
le duel guitare/sax est arbitré par les impitoyables hurlements
de Barrence. Ils s'attaquent aussi au "Who's Gonna Rock My Baby" de
Jerry Woodward (59 également) ou à "Barefoot Susie", un
blues avec piano frénétique, de Waymon Brown qui eut son
quart d'heure de gloire au début des 50's. Et "You Told A Lie",
chanté à l'origine par Johnny Sails en 64, résonne
ici comme du Screamin' Jay Hawkins grande cuvée. Quant au
monument soul de Lee Moses, "Bad Girl", il est d'une telle
incandescence qu'un halo lumineux continue à tourner au-dessus
de la platine une fois le bras reposé. Enfin, moi je le vois en
tout cas... Bon, c'est peut-être l'herbe de Fukushima que m'a
refilée mon pote Farid...
Sur les quatre originaux présents, deux semblent venir de loin
puisque co-écrits par Billy Mooney, pianiste de la formation
originale. Mais vu l'accueil positif qui sera, on ose l'imaginer,
réservé à l'album, on peut envisager que
l'histoire continue et qu'un nouveau disque arrive bientôt... Et
que le gang de Sauvages aura le temps de composer quelques vrais
nouveaux morceaux d'ici là. Les fantômes furibards de
Solomon Burke, James Brown et Wilson Pickett espéraient dormir
tranquille. C'est pas pour demain.
Gildas Cospérec
SUBSONIC
Vu la somme d'activités de ces deux-là, on savait avant de commencer l'entretien avec Sylvie Martin et Marc Hacquet
qu'il y aurait matière à bel article. Car derrière
la gare de Montpellier, il y a du sang (on exagère à
peine, celui de Lee Robinson a failli irriguer le quartier), de la
sueur, des décibels... et des procès intentés par
un voisinage fort peu complaisant. De plus, quand ils ne tiennent pas
permanence au Subsonic, ces Bonnie & Clyde des bords de
Méditerranée s'en vont assourdir l'Europe ou le Mexique
aux commandes de leurs chers Sonic Angels. Dont les albums sortent sur
le label-maison Speed Rds. Bien sûr... Discussion avec un couple
"do it yourself" jusqu'au bout des ongles.
Dig It ! : Vous
pouvez nous présenter l'asso Lola Product ? Elle regroupe pas
mal d'activités diverses... L'histoire a démarré
comment ?
Marc : L'asso a
été créée en 1991 dans le but de structurer
mon groupe de l'époque, les Dummies, et développer nos
diverses activités, organisation de concerts, productions...
Puis on a émigré en Espagne et sorti entre autre une
compil CD (Just for Pleasure #1) présentant de nombreux groupes
français. En 2001, forte de l'expérience espagnole,
l'asso s'est installée à Montpellier dans un local de 600
mètres carrés en centre ville, Le Subsonic. On a trois
salles de répètes équipées en sous-sol, au
rez de chaussée on trouve une salle d'enregistrement live d'une
centaine de places avec une large scène et une cabine
suréquipée en matos vintage, un espace bar/accueil
(bureau, merchandising, expos...) et l'étage est
dédié à l'hébergement. Près de 150
groupes y répètent et l'asso Lola compte en gros 2000
adhérents. Nous organisons par ailleurs des soirées
"évènements" à l'extérieur, comme la
Subsonica Open Air qui fête sa dixième édition
cette année ou la Rock Exotica Night, en été, avec
concerts, projections de films et shows burlesques.
Sylvie :
Après deux ans à Madrid, on est revenus en France
gonflés à bloc avec l'idée de reproduire ici la
movida espagnole (Rock Palace, Pleasure Fuckers, Safety Pin Rds,
Munster Rds, le Louie Louie Bar, Metalliko, etc....) à notre
façon. Y'avait aussi le mythe de la Factory d'Andy Warhol qui
nous hantait. Je crois que pour Marc, c'est les Peel Sessions qui le
faisaient flasher, d'où la naissance du Subsonic, les
subdivisions de Lola avec le studio et le label Speed Rds, Swing Heart
pour les expos et les projections ciné.
D.I : Vous vous
souvenez du premier disque que vous avez acheté ? Et de celui
qui vous a donné envie de plonger dans le bain rock'n'roll ?
Marc : On
n'achète personnellement pas énormément de disques
l'un et l'autre, mais notre discothèque s'agrandit au gré
des rencontres et des opportunités. Un des premiers disques que
j'ai acheté était je crois le Beatles à Hamburg,
presqu'en même temps que ma première guitare
électrique, en 75, mais c'est sans doute le premier Ramones qui
plus tard m'a vraiment donné envie de plonger dans le
rock'n'roll. Sylvie m'a dit que le plus marquant de ses premiers
concerts a été celui des Cramps à Toulouse au
Bikini en 81. Elle avait ensuite acheté un coffret de 45
tours... qu'on lui a piqué peu après à Barcelone.
Sylvie : Surement
un disque des Stones, mais la plupart on mes les a donnés.
J'étais plutôt addict de la copie cassette, et avec mes
potes on enregistrait tout et surtout l'émission Sabotage sur
Radio Alligator, c'était super passionnant ! L'animateur, Luc,
bégayait... mais c'était un monstre de culture rock.
D.I : Premier concert auquel vous avez assisté ?
Marc : Je m'en
souviens très bien, c'était Little Bob Story au Grenier
St Jean à Angers en 77, on n'était pas si nombreux, une
cinquantaine peut-être, dans une ancienne église
transformée en lieu de spectacle. Et spectacle il y a eu !
J'avais 15 ans et n'avais jamais pris autant de son dans les oreilles !
Je me rappelle particulièrement un jeune guitariste asiatique
qui accompagnait Bob à l'époque (Guy-Georges Grémy
- nda).
Sylvie : Mon
premier concert, c'était du reggae roots, premier pétard
aussi, j'avais 12 ans. Le jour de mes 14 ans j'ai vu Lou Reed sous
chapiteau. Mais le con-cert le plus marquant a été celui
des Cramps à Toulouse au Bikini, en 81 je crois, j'avais 16 ans,
j'étais au balcon parce qu'en en bas il y avait toute une
rangée de petits nazis que Lux a rapidement calmés. Kid
Congo à la guitare, Nick Knox à la batterie, et Poison
Ivy... le gong sur scène... j'en ai pris plein les yeux et les
oreilles. Ça a vraiment changé mon univers. Et
très rapidement je suis devenu accro, j'ai pu voir Johnny
Thunders plusieurs fois, le Gun Club, les Lords of The New Church, les
Fleshtones... Et des centaines d'autres depuis.
D.I : Et le premier que vous avez organisé ?
Marc : Je peux pas
te dire, il y en a eu tellement, probablement un concert de notre
premier groupe, le "do it yourself" fait partie intégrante du
rock'n'roll non ? Le premier concert au Subsonic a été
King Khan le 14 avril 2001, un concert inauguration en quelque sorte,
et aussi le début de nos problèmes de voisinage.
Sylvie : Pour moi
ça a été un concert du groupe de Marc en 91, les
Dummies. Une douche électrique, entre les Ramones, les Stooges
et X, avec Jackie au chant, une jeune punk charismatique qui à
ma connaissance est rentrée dans les ordres depuis.
D.I : Vous avez toujours habité Montpellier ?
Marc : J'habitais
à Angers avant de décider de migrer vers le soleil, en
87, avec tout mon barda musical, j'ai fait route pour Barcelone que je
ne connaissais pas. J'ai fait étape à Montpellier
où j'ai rencontré les Frenchies, ex-Angevins eux aussi,
un gang particulièrement incendiaire à mes yeux. Ils
m'ont proposé d'intégrer le groupe et je suis
resté. Il faut dire que l'ambiance y était
particulièrement rock'n'roll à l'époque... Tu
connais sûrement l'histoire... (OTH, Studio de la Loge, Rich Bar,
Rockstore, Etats Généraux du Rock...) et j'y ai
rencontré Sylvie qui elle est originaire de Montpellier. Nous
avons souvent par la suite eu l'occasion d'aller en Espagne pour y
faire des concerts, ou en balade, et mon attirance pour ce pays n'a
fait que se confirmer. Je me sens un peu Espagnol... Et nous nous
sommes donc installés à Madrid en 94. J'ai monté
Swarm et nous avons intégré l'équipe du Rock
Palace et la "movida rockera" du fameux quartier Malasaña. S'en
sont suivies de nombreuses tournées partout dans la
péninsule en tant que musicien, road manager ou simplement
driver. Nous avons aussi habité Elche où je jouais dans
un groupe punk appelé Radio Alicante Muerta. Et on est revenu
à Montpellier fin 90, un peu par nécessité, pour
ménager notre santé. Quant à Angers, j'y ai
grandi, fait et défait mes premiers groupes et monté mon
premier studio d'enregistrement, Zoot Allure, où sont
passés les Thugs, Lo'Jo Triban et beaucoup d'autres. Certes une
ville bien rock à l'époque mais trop tranquille quand
même à mon goût.
D.I : Ton studio s'appelait Zoot Allure ? Comme l'album de Zappa ?
Marc : Yes ! Mon
album préféré de Zappa, que j'écoutais
beaucoup à l'époque. Je l'ai vu deux soirs de suite
à Paris, en 85 je crois, deux concerts complètement
différents d'ailleurs et inoubliables, avec à mon avis
son meilleur groupe... Y'avait Terry Bozzio à la batterie et une
dizaine d'autres phénomènes.
D.I : Vos premiers groupes à chacun ?
Marc :
C'était vers le milieu des annés 70, au lycée, on
faisait des reprises de standards rock'n'roll. Sylvie joue de la basse
depuis peu, son premier groupe fut The What ! en 2002.
Sylvie : Oui, j'ai
commencé à jouer tardivement. En 2002, j'avais quelques
mois de basse et on a enchaîné une tournée
rapidement. On a pu jouer en plein air devant 200 personnes en
première partie des Hydromatics, la claque ! Je suis descendue
de scène et Tony Slug m'a encouragée, j'ai cru que
j'allais vomir mes tripes mais c'était trop bon. Un de ceux qui
m'ont donné l'impulsion, c'est Sonny Vincent pour qui, un an
auparavant, j'avais organisé une tournée, et voyant que
dans les backstages je me faisais royalement chier, il m'a
suggéré de me mettre à la basse, conseil que j'ai
appliqué dès mon retour de tournée.
D.I : Derniers disques dénichés ?
Marc : On revient
de tournée en Espagne et, à Alicante, notre pote Fernando
Metalliko nous a amené dans un super petit magasin de vinyles
d'occasion le lendemain du concert. Bien que pas très frais
suite à la nuit particulièrement agitée, il s'est
monté une véritable fiesta dans la boutique en
écoutant plein de disques. On a acheté des 33t de Los
Diplomaticos, groupe bolivien 60's mélangeant cumbias et
guitares surf, une musique super ensoleillée avec des titres
comme "Esperma Y Ron", un tube pour les dj cet été... On
a pris aussi un T-Bone Walker, un des pionniers de la guitare
électrique, et Full Cream le premier LP de Cream en 66, plus
quelques 45t de vieux classiques comme "Dandy/No Milk Today" de
Herman's Hermits, "Get Down and Get With It" de Slade, "Good
Vibrations" par les Troggs, le EP "Telegram Sam/-Cadillac/Baby Strange"
de T. Rex et le "Venus/Hot Sand" de Sho-cking Blue, que du bonheur !
Sylvie : Le 10
pouces de Lord Mouse and The Kalypso Katz ! Un groupe calypso rock
& roll composés de seize personnes toutes basées
à Berlin, on y retrouve Stéphane Doucerain qui fut
notamment batteur de feu Nikki Sudden. Le chanteur Kelly est de
Chicago, il t'hypnotise par sa voix et sa prestance. Et y'a six
merveilleuses danseuses/choristes et Tom au ukulélé... Je
ne peux pas les nommer tous... Il faut absolument les voir sur
scène. Ils sont fidèles aux racines traditionnelles du
calypso de Trinidad et ils y insufflent un côté moderne,
ça donne une musique jubilatoire. Ils vont revenir pour la
deuxième fois en France cet été.
LE SUBSONIC
D.I : Revenons aux problèmes
de voisinage que tu évoquais tout-à-l'heure à
propos du Subsonic. Vous avez deux procès sur le feu je crois..
Marc : Bueno... dès qu'on a
ouvert le Subsonic en 2001, une voisine est partie en guerre contre
nous... Elle ne supporte visiblement pas de vivre à
côté d'un lieu dédié à la culture
rock. Elle nous a fait un procès. Elle l'a gagné en 2010,
après huit ans de démêlés judiciaires et
tracasseries diverses. Elle a fait pression sur notre
propriétaire et auprès des services de
sécurité de la ville, des impôts et de la mairie,
pour que le Subsonic déménage ou soit forcé
à fermer. Un lieu hautement subversif à ses yeux
apparemment ! Nous avons déjà dû payer près
de 15.000€ et aujourd'hui elle nous demande 100.000€ de
dommages et intérêts, tout en sachant que nous avons
stoppé toute activité nocturne, concerts compris, dans
nos locaux depuis déjà plusieurs années.
Là, elle vient de perdre, et le tribunal lui a
concédé un euro symbolique, mais ça ne lui
plaît pas évidemment, et elle a fait appel. Voilà
où nous en sommes aujourd'hui... Par ailleurs nous avons
dû attaquer notre propriétaire qui, las de tous ces tracas
et voulant vendre le local, ne nous a pas reconduit le bail. Et comme
il n'y a pas je crois d'avocats suffisamment pointus sur le droit des
assos 1901, on est un peu livrés à nous même face
à un système hostile. J'en profite pour rappeler que la
loi limitant le son légal à 105 décibels n'est ni
plus ni moins que la signature d'un décret de prohibition du
Rock & Roll dans le pays !
D.I : Parmi tous
les groupes que vous avez croisés au Subsonic, lesquels vous ont
le plus marqués ? Vous devez avoir quelques belles anecdotes ?
Marc : Pour ma
part j'ai été impressionné par Deadbolt, leur
nonchalance abusive et leur ambiance envoûtante, surtout quand un
des trois bassistes du groupe, en plein morceau, jette son mégot
à la figure du guitariste qui aussitôt pose sa gratte et
brandit une disqueuse électrique, la met en route et fait
jaillir des étincelles dans toute la salle en la frottant contre
un bout de ferraille, wouah ! Heureusement que la commission de
sécurité n'est pas passée ce soir là... en
première partie notre ami Lord Diabolic avait déjà
sorti un engin similaire pour trancher la tête d' une
poupée Barbie. Les deux groupes ont d'ailleurs, plus tard dans
la soirée, pu comparer leur "instrument" respectif !
J'ai
également été marqué par la soirée
Sin City Six et leur côté "à fleur de peau"... Je
les connaissais déjà tous très bien pour avoir
vécu à Madrid, mais ce soir-là ils ont vraiment
brillé ! Après un super concert, électrique et
tendu, Norah et Mike, les deux guitaristes, se sont mis en tête
d'en finir une fois pour toute avec Lee Robinson, le chanteur
charismatique du groupe, qui je l'imagine bien, leur rendait la vie
impossible par ses changements d'humeur intempestifs et son sale
caractère. Il s'était retranché au premier
étage du Subsonic, où les groupes dormaient, avec en main
une barre de fer qu'il avait dénichée je ne sais
où et il tenait en respect Norah qui l'agressait avec une
canette de bière si je me souviens bien ! Quel cirque !
Après maintes négociations, il a fini par s'enfuir et
tout le monde s'est couché. Sachant qu'il allait bien revenir,
je l'ai attendu deux ou trois heures et à son retour, vers sept
heure du mat', j'ai pu enfin le tranquilliser en l'assommant à
coup de pétards doublement chargés. Le lendemain tout
avait l'air normal.
C'est vrai qu'il y
a un paquet d'anecdotes... La première fois que Tav Falco est
venu, je suis allé chercher le groupe à la gare,
heureusement toute proche. Ils tournaient à quatre à
travers l'Europe, en train, avec deux amplis Fender Twin, une batterie
et bien sur les guitares et le merchandising plus leurs sacs de voyage
! La galère quoi... Mais ce fut un concert mémorable,
d'ailleurs immortalisé sur vinyle. J'ai quand même un peu
halluciné quand, après le rappel, le public en
redemandant encore, j'entends Tav dire à Sylvie : "Ok pour un
deuxième rappel, mais c'est 100 Euros de plus"... Bien
tenté, c'est vrai qu'il fallait bien les payer ces billets de
train ! Mais ça fait parti de l'humour caustique de Tav, et ils
sont bien sûr remontés sur scène. Le lendemain j'ai
filé ma carte vitale à Douglas le batteur pour qu'il
aille en urgence chez mon dentiste avant de les raccompagner à
la gare... Mais pour moi le concert le plus marquant musicalement reste
celui de Dead Moon, à vous hérisser les poils
d'émotion, de sincérité et de simplicité !
Sylvie : Outre les
concerts que Marc a cités, il y a eu pour moi ceux des Flaming
Sideburns et des Bellrays, avec Jean-Luc en road manager
ultra-stressé, au bord de la crise de nerfs... Il n'a pas voulu
qu'on enregistre sous des prétextes bidons, heureusement Marc a
mis un micro dans la salle... En plus il a voulu absolument faire le
son et se servir de la console du Sub, résultat : deux enceintes
pétées... Faut dire que dans la cabine rien n'est
branché "normalement" et qu'on peut s'y perdre... J'avais
prévu 17 serviettes de bains mais ça ne suffisait pas...
Les deux groupes hallucinaient... C'était la troisième
fois qu'on faisait jouer les Flaming Sideburns et la première
fois au Subsonic. Avec les Bellrays il y avait une saine
compétition dans l'air, ils ont fait un de leurs meilleurs
concerts. Avec les deux groupes, les murs du Subsonic ont rugi ce soir
là !
SPEED RECORDS
D.I : Comment a débuté le label ?
Marc : Un jour,
sur la terrasse de l'appart qu'on avait à Elche, on s'est dit
qu'on pouvait sortir nous-mêmes nos disques. J'avais
installé mon studio d'enregistrement dans un local agricole
où on répétait, entre un atelier clandé de
fabrication de Nike et un entrepôt d'oranges. L'idée
était d'enregistrer comme on prend une photo, rapide et
efficace... comme le produit qui occupait souvent les soirées
à Elche. Je crois que l'enregistrement live est la meilleure
façon de retranscrire toute l'énergie d'un groupe et
l'authenticité de sa musique. On a eu ensuite
l'opportunité de rencontrer Jeff Dahl et de sortir un live (Jeff
Dahl and The French Connection) enregistré dans un petit bar de
Montpellier. Les 500 copies ont été rapidement
épuisées et le résultat sonore n'a fait que
conforter l'option d'enregistrer live. On n'a hélas pas les
moyens financiers de sortir en disques tous les enregistrements dont
nous disposons, par ailleurs la distribution est un gros
problème qui reste toujours à résoudre
aujourd'hui. On fait surtout des échanges avec d'autres labels,
on est l'opposé d'un label commercial. Il ne serait certes pas
désagréable de vendre des milliers de copies de nos
productions, mais ce n'est pas le but ultime...
Sylvie : Bueno, un
"label" c'est vraiment beaucoup dire... C'est vrai qu'on a sorti
quelques galettes mais finalement pas autant qu'on aurait voulu, car
franchement, avec tous les enregistrements live des concerts qui ont
été faits au Subsonic, et vu la qualité des
enregistrements, y'aurait moyen de sortir quelques perles rares. Faut
dire qu'on est très mauvais vendeurs l'un et l'autre. Donc, on
s'en sert surtout pour notre groupe, The Sonic Angels. Les disques on
les vend essentiellement aux concerts.
D.I : Le dernier
volume (#4) des compils Subsonic Live existe uniquement sous forme de
MP3 téléchargeables sur votre site. Et gratuitement
d'ailleurs. Il y a une raison à ce changement ?
Marc : Oui, on n'a
pas de thunes... L'idéal serait de les faire en vinyle, vu qu'on
est toujours très attachés à l'objet et au son.
Finalement le téléchargement gratuit c'est une bonne
solution dans le genre Do It Yourself. Tu download, tu graves, tu
copies la pochette et tu montes ton CD toi-même. Le Subsonic Live
Vol. 4 est excellent, que des bons groupes (Baby Woodrose, Dead Moon,
Hangmen, Masons, Groovie Ghoulies, Shortfuses, etc...) et la pochette a
été réalisée par Matt Konture. On aimerait
la sortir en sérigraphie d'ailleurs. On va sûrement
adopter la même formule pour les compils à venir et les
anciennes qui sont maintenant pratiquement épuisées.
D.I : Votre avis sur Internet et les downloads. Utile ou pas pour les groupes comme le vôtre ?
Marc : La musique
est destinée à tous et c'est bien que nous puissions en
disposer gratuitement... même si un disque est un objet qui doit
se vendre. C'est bien de pouvoir écouter avant d'aller voir un
concert par exemple, ou bien d'acheter un album. Internet est un super
outil, c'est devenu indispensable pour diffuser sa musique. C'est par
contre un peu trop facile dans certains cas, c'est la "culture
zapping", les gens ne prennent plus le temps de réellement
écouter, de creuser le sillon...
D.I : Y a-t-il un ou des labels que vous considérez comme des modèles ?
Marc : Sympathy
For The Record Industry sans aucun doute, In The Red, Safety Pin
Records par certains côtés...
D.I : Les meilleures ventes à ce jour ?
Marc : Jeff Dahl and The French Connection Live.
D.I : Les pires ?
Marc : What ! Le groupe a splitté avant la sortie du disque...
D.I : Celui dont vous êtes le plus fier ?
Marc : Tav Falco
and the Panther Burns. (le LP "Live At Subsonic", enregistré en
2001 et paru en 2002 -nda-)
D.I : Les prochaines sorties du label ?
Marc : Certainement le prochain Sonic Angels, Hard Break.
DI : Et il y aura
du changement sur Hard Break ? Des surprises ? Une reprise de Lady
Gogol ? Des sections cordes et cuivres ?
Marc : Bien
sûr ! Et aussi les choeurs des petits chérubins de la
cathédrale de Ramonesville... et j'allais oublier l'intervention
de Ravi Shankar sur "I See Red" ! Hé, si il y a changement ce
sera dans la continuité, les prises live et le tout aussi
essentiel que possible, je n'en dis pas plus. Vous pourrez
l'écouter avant la fin de l'année. Et en vinyle bien
évidemment.
Sylvie : Moi je
l'intitulerai plutôt Fucking Hard Break... Non pas de changement
en vue... Toujours Punk Rock New York-Detroit-Melbourne, Rock'n'Roll
Memphis, Psyché Austin-LA, avec quelques piments mexicains... On
saupoudre de French Touch et le tour est joué non ? Qu'est-ce
que t'en penses ? On a des chances de signer chez Virgin Megatruc avec
tout ça ? Dans tous les cas, avec Sonic Angels, on
prévoit d'aller en Australie, aux Etats Unis et de retourner au
Mexique... Passer du bon temps quoi ! Faut voir si on va pouvoir tout
faire cette année, peut-être qu'on va en garder un peu
pour 2013 si le monde veut bien attendre...
THE FRENCHIES
D.I : Je viens de
réécouter l'album Teenage Cry de 89 où tu jouais
Marc... Le disque a un côté Pop/Johnny Thunders... J'ai
même cru déceler quelque part un clin d'oeil à Joan
Jett, et une façon de chanter à la Joey Ramone sur "When
We'll Be Easy". C'était la somme de vos influences en gros ?
Marc : Oui, on
était tous les quatre à fond sur le punk rock new-yorkais
des mid-seventies. Fans des Ramones donc bien sûr... Nico Loco,
chanteur du groupe, avait aussi un coté théatral à
la Jim Morisson. Souvent décadents et insolents, on ne se
faisait pas que des amis !
DI : Vous avez beaucoup joué ?
Marc : A peu
près 150 concerts en trois ans, notamment en Grèce,
Suisse, Espagne et un peu partout en France. C'était une
aventure pittoresque à chaque fois, avec tous ces animaux dans
le groupe... Plus la défonce... On n'a pas toujours
été au top. Il a fallu parfois en récupérer
certains in extremis pour pouvoir assurer le concert. Tout cela use, et
ça explique sûrement pourquoi le groupe s'est
arrêté et que la plupart des membres soient aujourd'hui
"hors circuit".
D.I : Tu sais ce qu'ils sont devenus ?
Marc : Christian Marquez, le batteur,
est plombier depuis 20 ans. Lui il s'est remis à jouer, avec
Lolita Larsen à Montpellier. Nico Loco, lead vocals et sax, est
aujourd'hui quelque part dans le Massif Central et hélas
complètement out of space aux dernières nouvelles...
Denis Alligon, guitare et chant, est décédé
d'overdose en 90. Bruno Baron, le bassiste, est aujourd'hui jardinier
je crois, et sans activité musicale.
Sylvie :
C'était le groupe le plus excitant de la scène
française, avec les Backsliders. J'ai jamais été
branchée par la scène alternative et ceux-là
donnaient un bon coup de pied à tout ça,
DI : A part Teenage Cry en 89, il y a eu d'autres disques des Frenchies ?
Marc : Non seulement celui-là
chez New Rose et quelques morceaux sur diverses compilations en France,
en Espagne et en Angleterre.
SONIC ANGELS
D.I : Difficile,
vu la composition du groupe, de ne pas penser à Dead
Moon/Pierced Arrows... Pas seulement parce qu'un couple est aux
manettes mais parce que vous êtes vous aussi adeptes convaincus
du "Do It Yourself". Vous avez tout fait/tout conçu, de A
à Z, pour le dernier album, de la prise de son à la
pochette. C'est une façon de ne pas être
déçu par le résultat ?
Marc : C'est une
façon de faire... Je suis passionné d'enregistrement et
j'ai souvent été déçu par les sessions dans
d'autres studios. Au Subsonic on peut travailler à notre rythme
et à notre manière. On a réuni tous les outils
pour réaliser nous-mêmes nos projets, de la conception
à la réalisation, et en y prenant plaisir. Pour certains
disques on a fait appel à des graphistes ou illustrateurs qu'on
apprécie beaucoup comme Leviathan ou Sergio Mora en Espagne...
C'est flatteur que les Sonic Angels te fassent penser à Dead
Moon, on les aime beaucoup.
D.I : Vous connaissez Fred et Toody ?
Marc : On les a
connus quand ils sont venus jouer au Subsonic en 2004, on
n'était pas très nombreux, une trentaine de personnes -
dire qu'ils remplissent les salles dans les pays du nord ! - et ils ont
fait un super concert. C'était magique, l'enregistrement du
concert en atteste ! Et pour avoir fini la soirée ensemble, on
sait que Toody et Fred sont vraiment super cool. Ils n'ont jamais
lâché prise, aucun compromis aux modes du moment, des
super compos... Leur parcours et leurs disques sont un bel exemple
d'aventure Rock'n'-roll. Le fait de jouer en couple est une formule
idéale pour nous.
D.I : Sur
l'avant-dernier album, Learn Love Care and Celebrate, le groupe jouait
avec des batteurs différents sur tous les morceaux. Un sorte de
première...
Marc : Nous avons
voulu faire participer les différents batteurs avec qui nous
avions déjà joué ou cherché à jouer.
L'idée était d'enregistrer avec chacun, en un
après-midi, une version d'un morceau phare pour nous et une
composition s'y apparentant. En sont sortis trente morceaux, dont
quinze versions avec quinze batteurs distincts, la moitié des
titres est sur ce disque. On a aussi joué quelques fois avec
deux batteries en même temps, le pied ! Changer de batteur, c'est
une nouvelle expérience à chaque fois, ça permet
de faire des nouveaux morceaux et d'avancer, de faire évoluer la
musique. Pas toujours comprise, notre démarche est souvent
désopilante pour beaucoup de gens qui ne savent pas avec qui on
va venir ni quel répertoire on va jouer.
D.I : Comment s'est passée la dernière tournée des Sonic Angels ?
Marc : On est
partis en avril pour une quinzaine de jours, en France, Suisse,
Autriche, Allemagne, puis quelques days off à Montpellier et
ensuite encore quinze jours en France et en Espagne. On est partis
à trois, avec Chris Mojo à la batterie, et on s'est tous
les trois régalés malgré parfois le manque de
public. On a joué dans de nouveaux endroits, fait pas mal de
nouveau morceaux et rencontré presque partout des connaissances
ou des amis de longue date. Leipzig, Dresden, Alicante, Valencia...
C'était super... A Berlin on a revu Tibo avec qui nous avons
longtemps joué et qui y vit depuis deux ans.
Sylvie : J'ai écrit un tour report, tu peux en utiliser un bout si tu veux.
Voici
donc un extrait du compte-rendu de la tournée des Sonic Angels
au printemps dernier. Sylvie y raconte l'étape de Mont De Marsan
:
"On joue au
Havanita, c'est mignon... Le patron nous accueille avec vin local,
fromages et canard... C'est un fin gourmet, on est ravi parce que nous
aussi... La balance se passe bien... 22h30, public très
hétéroclite... On démarre... et dès le
premier morceau on nous dit que c'est trop fort... "Mais non ! C'est
exactement comme à la balance ! On n'a rien touché ! Pas
monté le volume, rien ! Promis ! Juré !". On a juste
peut-être un peu plus d'énergie... Normal on est en train
de faire un concert, n'en déplaise au patron qui n'entend plus
ses clients commander... Et en plus une partie des dits clients
retourne sur la terrasse. D'après lui c'est signe qu'il faut
qu'on baisse le volume... Bon, on le fait... J'entends plus ma basse et
je devine tout juste la guitare, mais pour la batterie,
désolé on peut rien faire... Chris retient tous ses
coups, il va choper une crampe si ça continue... On arrive
à jouer trois ou quatre morceaux tant bien que mal et finalement
on nous dit d'arrêter... Celle-là on nous l'avait jamais
faite... On replie les câbles et on va pas tarder à y
aller... Tout le monde nous dit que c'était super... Dommage...
Voilà, il ne se passe rien à Mont-de-Marsan... Y'a
même pas un magasin de disques... Hé les gars ! Dans mon
merchandising j'ai une cinquantaine de disques à vendre, que de
la bombe, spécialement sélectionnés pour vous,
à des prix super cool... Et personne n'y prête
attention..."
D.I : Et la partie espagnole de la tournée ?
Marc : Ça
s'appelle "13 DAYS OF ROCK'N'ROLL IN SPAIN !!!" No comment... Le titre
est suffisamment explicite.
D.I :
L'Espagne a pas mal changé ces derniers temps, la vie y est plus
difficile... Vous avez remarqué la différence
avant/après la "crise" ?
Marc : Partout
c'est plus difficile, et plus particulièrement pour les
Espagnols en ce moment. Même eux subissent de plus en plus de
lois à la con. Anti tabac, anti bruit, interdiction de boire
dans la rue alors qu'il fait une chaleur à crever et que tout le
monde à envie de rester dehors tard dans la nuit... Ils sont
parmi les derniers en Europe à avoir été
touchés par ce phénomène d'interdictions tous
azimuts. Ça reste quand meme un pays très rock and roll
dans la mesure où les gens ont l'habitude de se
débrouiller par eux-mêmes et n'oublient surtout pas de
faire la fête. Pour avoir été jouer à peu
près partout en Europe, on peut dire que tout se ressemble de
plus en plus hélas, mais qu'il reste en Espagne toujours quelque
chose de différent, peut-être un reste d'anarchie... No
pasaran ! Viva la lucha ! El pueblo unido ! Lanza piedras !
Gildas Cospérec
Petit zoom sur la dernière fournée de ce label australien
généreux dont l’ambitieuse devise est
d’exporter “The best in australian garage powerpop and
rock’n’roll”. Le plus étonnant est que
jusqu’à présent, ils ont tenu leur promesse : plus
d’une centaine de disques en une dizaine d’années,
presque tous consacrés à la scène australienne,
excellents pour la plupart, jamais franchement mauvais en tout cas.
Sept nouvelles galettes qui vérifient cet adage.
On commence avec les seuls non australiens du lot, Los Chicos
qui fêtent leurs dix ans d’existence avec un best of
poétiquement intitulé 10 Years Of Shakin’ Fat And
Lauchin’ Shit. Attention, on parle bien des garagistes espagnols,
et non du fameux boys band seventies de Porto Rico, il y a
d’ailleurs d’autres confusions à éviter
listées sur leur blog ! Les seize titres sont tirés de
leurs quatre albums, les trois extraits du premier ayant
été réenregistrés pour l’occasion.
Le morceau
d’ouverture sonne comme une profession de foi : “We Sound
Amazing But We Look Like Shit” ! On ne peut les contredire, sur
le son en tout cas. En plus ils savent tout faire : garage R&B
festoyant à la Woggles, 60’s beat percutant, wild rock
graisseux, power pop vitaminée, country rock alcoolisé,
clins d’oeil malicieux aux Fleshtones ou à Dr Feelgood.
Une excellente occasion de les (re)découvrir et de plancher sur
leur équation magique : Rock and Roll + Rhythm & Blues +
Soul + Punk + Pub-rock + Country + Cerveza = FIESTA ! (http://loschicosrocks.blogspot.com)
The Hard Truth est le deuxième album des Dunhill Blues
(on peut les appeler les Dunnies, même si pour des francophones
ça sonne pas très rock’n’roll), un sextet de
Sydney qui se distingue par une instrumentation pléthorique :
guitare, basse, batterie, theremin, orgue, trompette, sax, banjo, piano
etc. OTH (tiens ça me rappelle quelque chose) les qualifie de
meilleur groupe de la contrée dans le genre
“Blues-Punk-Country-Garage-Rock-Psychedelic-Soul-Revival”...
Ben ouais, on y retrouve bien tout ça, allégrement
tripatouillé, sur seize titres cartons qui déboulent en
trente-trois minutes, avec en sus une dose de Death Punk à la
early Turbonegro, des dérapages destructurés façon
Jon Spencer Explosion plus des choeurs braillards et cette attitude
ironique et morveuse qu’on aimait bien chez les Sailors. Petit
bémol, il faut se faire à la voix criarde, et parfois
crispante quand le screamer se croit obligé de nous essorer ses
cordes vocales dans les tympans. (myspace.com/thedunhillblues)
Rocket To Memphis
a enregistré ce troisième album à New York sous la
houlette du producteur émérite Matt Verta-Ray, des Heavy
Trash / Speedball Baby. C’est dire que le son de Jungle Juice est
cru mais soigné, la guitare bien grasse qui se paie de
fréquentes giclées incisives et la voix sexy de Betty
Bombshell étant déjà de solides arguments. Les
morceaux naviguent entre rockab’ crampsien, swing, groove,
exotica, effluves vaudou inoffensives mais séduisantes et
échappées psychédéliques. Avec en prime des
refrains aguicheurs et une chouette reprise de Jack Scott (“Never
Felt Like This”). (http://rockettomemphis.com)
Dans la
foulée de son album avec les Secrets, Johnny Casino s’est
dégotté deux nouveaux acolytes, Mike Burnham à la
batterie et Rodney Agar des Mess Makers aux vocaux, pour un nouveau
projet intitulé The Lord Street Sound.
Grosse guitare, beat de la mort, vocaux scandés... Houla ! Le
morceau d’ouverture “Human Chunk” ressemble à
du heavy Hip Hop ! La suite est assez bizarroïde, garage, dark,
rap, hard, hypnotique, psyché... Quelques réminiscences
curieuses, de Hawkwind jusqu’à ces morceaux parlés
qu’on aimait bien chez les Sailors (encore !). Pas vraiment
convaincant au premier abord, Behind The Dumb mérite
probablement une seconde chance.
Les Little Murders ont
sorti leur premier single en août 79, “Things Will Be
Different”, célébré quelques années
plus tard par un certain Gildas Cospérec dans Nineteen,
révéré aujourd’hui comme une des perles du
power pop australien. Un premier break en 84 fut suivi d’un
parcours erratique, une poignée de singles et quatre albums
entre 86 et 2001, et une nouvelle résurrection en 2009
après la publication sur OTH de l’anthologie Stop Plus
Singles. Rob Griffiths est de retour plus de trente ans après
ses premiers exploits et Dig For Plenty ravira les vieux fans comme
tous les amateurs de power pop léchée, teintée de
country ou de glam à l’occasion, et même de
psychédélisme comme sur le prenant morceau final
“Velvet (Get Out Of Bed)” qui nous replonge dans des
ambiances oubliées à la Green On Red / Dream Syndicate.
Un rien nostalgique tout ça ! (myspace.com/littlemurders)
This Ain’t No Paradise est le deuxième opus de Mass Cult,
un gang de Melbourne qui propose un cocktail garage/indie pop/new wave
parfois tendu et efficace (“The talk Of The Town”), parfois
plus pop ou virant vers la ballade envapée. Leur son
minimaliste est très maîtrisé, trop sans doute,
carrément froid à la longue. Ils devraient se
lâcher, faire péter les watts, mettre un peu de folie, car
ils ne manquent pas d’idées, même s’ils
recyclent le riff de “In The Night Time” sur “Life At
The Top”, qui par ailleurs m’évoque vaguement les
Sailors... Euh... Y’a encore du boulot avant de devenir culte,
mais on peut garder une oreille sur eux. (myspace.com/masscultsuicide)
James Baker, le
batteur mythique au pédigree long comme un jour sans fuzz
(Victims, Scientists, Hoodoo Gurus, Beasts of Bourbon, Dubrovniks...),
a fondé avec un certain Joe Bludge à la guitare
acoustique les Painkillers, un
duo étonnant qui a déjà pondu deux albums (Drunk
On A Train et Love Cancer). Le tout dernier, Feel The Pain, contient
onze titres marquants, minimalistes, sur les traces des Modern Lovers
et du Velvet. Plusieurs plages nerveuses, des saveurs country, des
ballades poignantes, des effluves dylanesques et deux reprises :
“Lipstick” du gang de Perth The Homicides, et le
“Gamblin’ Bar Room Blues” de Jimmie Rodgers,
où la voix traînante et désabusée de Joe
fait merveille. Une voix vibrante, un peu cassée, qui porte
aussi l’émouvant “Rodeo”. Une voix qui me
rappelle... non, pas les Sailors... Hum, un timbre familier en tout
cas, et un vrai talent de songwriter. Chaudement recommandé ! (the-painkillers.com)
Sylvain Coulon
digitfanzinearchives@gmail.com
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