Le torse le plus célèbre
du monde, avec toutes ses cicatrices (et sans tatouages !), nous offre
ici ce qui pourrait bien être son chant du cygne. Enfin, s'il ne
se réacoquine pas avec James Williamson pour une nouvelle reformation
des Stooges.
Le premier truc qui saute aux oreilles
c'est la qualité du son, un des meilleurs que j'aie jamais entendu
sur dvd. Dès les premiers riffs de "Loose", la gratte de Ron Asheton
fait dans la boucherie. Il joue fort, avec la rage et une putain d'énergie.
C'est "Down On The Street" mon préféré, carrément
grivois quand Iggy grimpe sur le Marshall de Ron et mime une torride
et intense activité sexuelle. La guitare crépite sur "1969"
et Ron crache un violent solo de wah-wah. (Note : Y'a une bonne leçon
à prendre pour tout aspirant guitariste punk ici, on peut voir avec
précision où se posent les doigts de Ron sur chaque riff).
Iggy déborde d'énergie comme d'habitude, même s'il
ne s'ouvre pas la poitrine avec des tessons de bouteille. C'est d'ailleurs
le seul truc qui manque...
Avec sa veste de treillis, Ron Asheton
ressemble à Michael Moore. Quelqu'un devrait lui expédier
une croix de fer et un casque nazi avant qu'ils passent ici bientôt
(en Suède), au festival de Skeelefteå... J'envisageais d'aller
à ce festival, mais le billet d'avion est trop cher pour moi, de
plus, j'ai pas envie de donner un rond aux Latrine Kings qui sont au même
programme. Le Sheikh ne peut pas décemment être vu à
un concert d'un groupe de rap de merde sponsorisé par l'Etat hein
?
Sur "I Wanna Be Your Dog", Iggy ralentit
la machine et relance rapidement tout à fond. Il n'y a que les grands
performers soul comme James Brown qui arrivent à faire ça
parfaitement d'habitude. Sur ce morceau je trouve que Mike Watt le bassiste
ressemble un peu à l'inspecteur Colombo. Quelqu'un devrait lui expédier
un imper clair. Quant à Scott Asheton, on dirait un taré
sorti du Silence des Agneaux, le genre de mec à attirer des jeunettes
à l'arrière de sa camionnette. Il tient un impeccable rythme
tribal tout au long du concert. Quelqu'un devrait lui expédier votre
petite soeur.
Iggy jure comme un charretier mais la joue
également familial, genre "tarte aux pommes de maman" pour le public
de sa ville natale. Juste avant d'attaquer "Dirt", il fait un discours
sur les différences entre classes sociales... Pendant le morceau
il s'étrangle avec le fil de son micro. On sait où GG Allin
a piqué l'idée... Ron crache un autre solo killer à
la wah-wah. Sur "Real Cool Time", Iggy invite le public à venir
danser sur scène. Quelques allumés montent et certains se
pointent même aux micros pour "No Fun". J'ai repéré
une petite avec une de ces paires de nichons ! Le cameraman aurait dû
la filmer plus longtemps. C'est miraculeux que le groupe puisse encore
jouer avec tout ce monde sur scène, pourtant ils s'en tirent très
bien. Ils continuent même quand les lumières tombent en panne
au milieu de "TV Eye". Les danseurs d'un soir sont priés de quitter
la scène juste avant que le groupe entame "1970". Iggy a l'air bien
chaud maintenant, il hurle "ouvrez les putains de portes, il me faut de
l'air !".
Steve Mackay se lève
et fait cracher son saxophone, il restera jusqu'à la fin du set.
Il apporte une touche funky cool à "Funhouse" pendant qu'Iggy refait
le coup du calme et de la tempête à la J. Brown. L'Iguane
hurle "I am not a fucking product, I am you !" sur la fin "avant-gardiste"
du morceau. Puis ils se lancent dans "Skull Ring", un de leurs nouveaux
titres. Ça remue en finesse sur un riff mutant apparenté
à "Peter Gunn" avec des textes qui parlent de filles faciles et
un solo de guitare à la "Kinks sous acide". Parfait !
"Not Right" est exécuté
brut de décoffrage, minimaliste et juste à point. Ils se
lancent ensuite dans un plan Bo Diddley sur "Little Doll" et finissent
le set en refaisant "I Wanna Be Your Dog", avec le sax cette fois. Pendant
le morceau, Iggy se prend une bouteille sur le nez. On peut d'ailleurs
constater que la scène est jonchée de bouteilles de bière
vides. Je me demande si c'est le groupe qui les a vidées ou si c'est
le public qui les a balancées là avec le secret espoir de
voir l'Ig s'en taillader.
Note pour les fans de
Turbonegro : pendant qu'Iggy chante "I Wanna Be Your Dog", son pantalon
glisse petit à petit et finit par dévoiler son cul.
En bonus, le show lo-fi dans une boutique
de disques de New York avec juste Iggy, Scott et Ron (et ils y prennent
visiblement du plaisir) fait de cet objet un truc essentiel et une bonne
raison de vous acheter un lecteur de dvd au cas où...
Note : Y'a même un autre bonus débile
genre : "toi aussi chante avec le groupe d'Iggy".
THE
BEATLES
First U.S. visit. (Apple).
Voilà un cadeau idéal
pour fans des Milkshakes, Kaisers et tout ceux qui n'ont pas les moyens
de se payer l'Anthologie du groupe. Le film montre que les Beatles étaient
des musicos bien plus sophistiqués que les deux groupes cités
plus haut, même dès leurs débuts. Un coup d'oeil aux
prouesses en fingerpicking (à la Chet Atkins) de George Harrisson
ou aux rythmes cinglés de Lennon pendant "All My Loving" suffit
pour comprendre. Et il puis y a ces harmonies, certaines encore plus réussies
que sur les versions studio. Ecoutez bien le travail harmonique de John
sur "I Want To Hold Your Hand" par exemple. Ce dvd est peut-être
plus vital encore que l'Anthologie parce qu'il propose plus de passages
sur scènes où le groupe est vraiment bon (malgré les
hurlements). La version live de "I Saw Her Standing There" est LE meilleur
morceau rock des Beatles et supporte aisément la comparaison avec
pas mal de garage bands d'aujourd'hui. Tout comme la combinaison batterie/chant
de Ringo sur "I Wanna Be Your Man". Même si ses vocaux sont loin
d'être parfaits, la version est digne du meilleur garage rock contemporain.
Ce petit document noir & blanc, filmé caméra à
la main par les frères Maysles, était sacrément en
avance sur son temps (cf : les films Dogma). Une sorte de décalque
de Hard Days' Night... Le voyage en train de New York à Wahington
avec les journalistes et la petite fille est d'ailleurs pompé (avec
des écolières à la place de la petite fille) sur Hard
Day's Night, mais ici c'est plus intéressant puisque réel
(contrairement à H.D's Night qui était scénarisé).
On y voit aussi les Beatles s'éclater un max à un show de
Joey Dee And The Starlighters (au Peppermint Lounge, Ringo entame un twist
sur "Money" avec une des futures starlettes de la bande d'Andy War-ass-hol).
Plus tard, le groupe teste les derniers modèles de transistors,
casques audio sur les oreilles. C'est plutôt bon enfant... Ça
allait bien changer au cours des tournées US suivantes où
le groupe allait se voir régulièrement harcelé et
menacé de mort par des gugusses genre KKK.
THE PUNK ROCK MOVIE
Don Letts. ( K7).
J'crois que le moment est venu
de faire une entorse aux règles de cette rubrique et de parler d'une
bonne vieille cassette vidéo que avez peut-être déjà
dénichée en solde.
The Punk Rock Movie est un
"document historique" sur les premières heures du punk british.
Filmé par Don Letts sur une caméra préhistorique,
le son est vraiment lo-fi, mais pour la majorité des groupes, on
n’y aurait entendu que du feu même si l’enregistrement avait été
en hi-fi vu que la plupart savait à peine jouer (ils sonnent comme
certains groupes de garage japonais contemporains...).
Chacun voyant midi à
sa porte, on pourra toujours dire que Don Letts était plus intéressé
par le fait de filmer les bouts de seins que les punkettes voulaient bien
laisser entrevoir (finalement, on voit bien l’image que notre rasta niais
et libidineux donne des punkettes lorsqu’il montre les Slits). La plupart
des filles punks sont vraiment moches et le public se résume en
grande partie à des gays et lesbiennes, étudiants aux Beaux
Arts avec svastikas et épingles à nourrices. C’est rageant
de penser que cette clique pathétique a détruit le vrai pub
rock (celui de 74 à 76). Les groupes de pub rock savaient jouer
vite et bien du vrai rock de prolo sans prétentions ni conneries
politiques (j’ai vu les Pirates faire la première partie de Generation
X et les ridiculiser en leur piquant la vedette). Les punks des débuts
n’étaient que des poseurs en plastique, avec leurs fringues de frimeurs
et hors de prix de chez Vivienne Westwood. Un peu comme les garagistes
modernes avec leur coupe du jour de l’an et leur nylon pue-la-sueur, marque
de fabrique "fringues et bagnoles amerloques fin 60’s". Signalons pour
info que beaucoup de groupes australiens continuent quand même aujourd'hui
à entretenir l'esprit et l'attitude pub rock.
Sur cette vidéo les
seuls à s'en tirer sont Johnny Thunders & The Heartbreakers
et les Sex Pistols. Pour une fois, on entend la basse de Sid et il semble
s’en sortir très bien. ça doit être avant que les Heartbreakers
l'entraînent dans l’héro -ouais ils l’ont tué !- (note
du trad : il semblerait que sa mère n'y ait pas été
pour rien non plus, et ce dès le début), et rien que pour
ça, la vidéo vaut le coup d’œil)
Avertissement à tous
les musulmans : Cette vidéo montre le groupe incroyant les Eaters
découpant la tête d’un porc sur scène. Après
cet acte infidèle, ils balancent les tranches dans le public. Une
fatwa sur les Eaters ?
THE
CLASH
The Essential Clash (SMV)
Ce dvd contient du matériel très dispensable comme "Radio Clash" et "Fuck The Casbah". Le meilleur se cache sur les vidéos bonus promos du Clash jouant "1977" (leur tout meilleur titre), "White Riot" et "London's Burning", toutes de 1976. Dommage qu'il n'existe aucun dvd des 101's car c'était vraiment le groupe essentiel de Joe Strummer (réécoutez donc le single "Keys To Your Heart").
Westway To The World (SMV)
Evitez celui-là, il ne s’agit que d’une interview du Clash réécrivant sa propre histoire. Un Topper Headon largué nous raconte comment son addiction à l’héroïne a mis fin au groupe (apparemment il a utilisé sa dernière paille lorsqu'il a vomi sur la tombe de Buddy Holly). Ce dvd est juste un moyen pour Don Letts de se faire de la thune... et vous n'allez quand même pas lui payer sa ganja hein ?
Rude Boy (Metrodome)
Quand j'ai vu le film pour la première
fois en 1980, j’avais été un peu déçu car je
m’attendais à du Clash non-stop, mais rétrospectivement ce
film est plutôt cool car le portrait de la réalité
qu’il dépeint n'a pas vraiment changé. Rude Boy raconte l’histoire
de Ray Gange, un punk sans emploi bossant une partie du temps au black
dans un sex-shop (le job-fantasme de n’importe quel mec non ?). Ray est
un fan du Clash mais pas de leur politique. Il se fait exploiter par le
groupe en tant que roadie et développe en même temps une dépendance
à l’alcool.
Ce film est bien meilleur que le Great
Rock'n'Roll Swindle des Pistols. Et Rude Boy décrit la réalité
de la fin des 70s sans réécrire l’histoire comme The Filth
And The Fury l’a fait. Le film montre à quel point la scène
punk fut manipulée par la gauche avec la Ligue Anti-Nazi et le mouvement
Rock Against Racism qui n'étaient que des instruments du Parti Socialiste
des Branleurs (note du trad : Mike joue sur les mots : "wankers" pour "workers").
J’ai fait partie de ceux manipulés par la Ligue en collectant de
l’argent pour eux à cette époque là (ironiquement,
la plupart des membres du National Front à mon boulot me prenaient
en pitié et m'en filaient !!!). Le film nous montre des clones de
Karl Marx, grandes barbes en broussaille, collectant de l’argent dans des
seaux au Victoria Park où le festival Rock Against Racism utilisait
le Clash comme tête d’affiche. On ne réalisait pas à
l’époque que le Parti Socialiste se servait des fonds amassés
pour financer la soi-disant "révolution" en Iran, et nous savons
tous à quoi ça a conduit. Le film montre aussi que la gauche,
comme aujourd'hui, a toujours été rapide à utiliser
la violence. J’ai un faible pour une théorie qui dit que si on se
débarrassait de toutes les barbes en broussaille du monde, on aurait
la paix...
Bon, trêve de billevesées
politiques. Le Clash est superbe tout au long du film, livrant des versions
live supérieures de "Police And Thieves" (meilleure que l’originale
même si la guitare de Strummer est légèrement désaccordée),
"White Riot" (avec Jimmy "Sham 69" Pursey au chant), "Safe European Home"
et "What's My Name" (sublime !) (oubliez "I Fought The Law", la version
définitive est celle de Bobby Fuller). La qualité du son
est assez bonne, bien qu'en mono, mais vous devrez monter le son pour les
dialogues.
On se souvient généralement
de Rude Boy pour la scène où Ray se fait sucer dans les toilettes
pour dames par une pute, mais il y a également une charmante scène
de "guili-guilis" entre videurs et punks à Glasgow (où d'autre
?). Mick (salut crâne d'œuf) Jones apparaît comme l'arrogant
poseur qu'il est (il est venu me voir une fois au Roxy en 77 et m'a dit
de me faire couper les tifs !). Dans le film, on dirait un croisement entre
Keith Richards et un Jimmy Page à la calvitie naissante. Quelqu'un
aurait dû lui dire de se couper les tifs !!!
En vérité le Clash était
très conscient de son image et ce film expose cet aspect de leur
personnalité. Joe Strummer était un performer plus honnête
quand il était dans les 101's et faisait des mouvements de jambes
à la Chuck Berry sur toute la scène.
A la fin du film, Maggie Thatcher elle-même
fait une apparition, discourant sur la loi et l'ordre. C’est d'ailleurs
très ironique car il y eut de moins en moins de loi et d’ordre dans
les rues sous le règne Thatcher à cause de l'accroissement
de la pauvreté et du chômage que son état policier
avait créés. La vérité c'est que les punks
ne l'ont jamais eu aussi belle que lorsque les Travaillistes étaient
au pouvoir à la fin des 70's. Tu travaillais si tu le voulais (il
y avait pas mal de boulots occasionnels pour les ouvriers) et tu étais
"demandeur d'emploi" si t'étais de ces étudiant aux Beaux
Arts issus de la classe moyenne. Les gens n'étaient pas au chômage
forcé à cette époque. Ce dvd est vraiment le truc
essentiel à avoir sur le Clash car il montre le groupe avant que
celui-ci ne disparaisse totalement derrière son trou du cul (en
Amérique) avec l’addiction à l'héroïne et le
rap de merde. Merci CBS (Capitalisme Bien Saignant).
En bonus : le Clash fait "English Civil
War" live et une version déprimante de "White Riot".
Note : Rude Boy se déniche facilement
à moitié prix dans les grands magasins de disques.
(Note du trad : Rude Boy en dvd n'est dispo
en France qu'en import, cher donc, et sans sous-titres, c'est important
because même si t'as un bon niveau d’anglais, vu l’accent à
couper au schlass, t'en chies velu ! Il est également à noter
qu’il existe une édition de Rude Boy bien meilleure (Rude Boy The
Movie Special Edition, Import Gibert) qui inclut en bonus un concert monumental
du groupe à Munich en octobre 77 et un fanzine promo de 40 pages,
hélas again, en VO only !)
RUDE BOY REVISITED
(Post-scriptum)
Vous venez de le lire, Bad Mongo, mon traducteur, a attiré mon attention sur la Special Edition de Rude Boy. Elle coûte le même prix qu'un CD et le son est en stéréo, quoique moins bon que le mono original. Ma copie coince à certains passage (comme dans Essential Clash). C'est toujours le même problème avec la merde digitale en général mais la Special Edition vaut vraiment le coup pour les sept morceaux filmés live à Munich en octobre 77 quand le Clash était au top. La qualité sonore est un brin lo-fi mais ce court film capture vraiment l'énergie et la présence scénique de Strummer, Jones et Simonon en 77. Le caméraman porte successivement son attention sur chaque membre du groupe et Joe est de loin le meilleur sur "Hate And War". Ce moment révèle un vrai coeur rock'n'roll et sa performance sur ce titre est un summum de guitare punk rock. C'est comme ça que je préfère me souvenir de Joe Strummer. Un truc légèrement irritant quand même : Certains morceaux sont entrecoupés d'interviews où Paul simonon sort des trucs du genre "Les vieux (allemands) se comportent comme des nazis" et il ajoute qu'il "veut vraiment aimer l'Allemagne". La Special Edition inclut également un fanzine promotionnel de 40 pages de 1980 et des interviews très honnêtes de Ray Gange (le rude boy), Johnny Green (le tour-manager du Clash), Jack Hazan (réalisateur) et David Mingay (co-réalisateur).
Mr. Mongo m'a également demandé pourquoi je n'avais pas mentionné le film de Joe Strummer Hell W.10 dans les bonus de "Essential Clash". Je pensais qu'on en avait assez parlé dans la presse mainstream. Et je le pense encore. Mais je dirais quand même que c'est un bel effort pour un premier film. Joe Strummer a recréé avec succès l'atmosphère d'un vieux film muet en noir et blanc, avec le Clash, de vieux potes à eux, quelques petites amies et la fondatrice de RELEASE (conseils juridiques pour les délits liés à la drogue) et journaliste au Melody Maker, Caroline Coon, dans une histoire de drogues, de gangsters et de films pornos. Le Clash a écrit la bande sonore comme un hybride rock-dub avec de légères traces de Link Wray. Ça aurait pu être plus authentique si Joe Strummer avait simplement joué la bande son au piano.
Le moment fort du film c'est quand Simonon arrache l'oeil d'un traître avec une planche cloutée. La vue d'un oeuf peint pour évoquer un oeil empalé dégoulinant de sang me fait penser au surréalisme de Dali avec les oeufs dans son art et les yeux dans ses films. Personnellement, j'ai également ressenti un relent de nostalgie en les voyant faire un tour dans une vieille Zodiac.
Encore une note : Dans
le dernier numéro de Dig It !, j'ai oublié de mentionner
les bonus du dvd Gimme Shelter. Soit un film fragmenté avec en bande
son (mono) "Little Queenie" et "Oh Carol" (similaires aux versions de Ya
Yas) et une excellente version de "Prodigal Son" avec simplement Keith
au Dobro et Mick au chant (Richards se réaccorde tout au long du
morceau !). Vous avez aussi un livret de 44 pages avec un article de notre
Hell's Angel préféré, Sonny Barger.
SLADE
In Flame (Union Square Pictures)
Ce film (un vrai film) est le portrait classique
d'un groupe se débattant avec les 60's finissantes. Le titre principal,
"How Does It Feel" sonne comme un morceau sorti tout droit de Let It Be.
Assez bizarrement, ce single fut le premier flop de Slade après
des débuts en bonne place dans la course au succès. La connexion
avec les Beatles de s'arrête pas là. La voix de Noddy Holder
a toujours sonné comme un croisement entre John Lennon et Little
Richard. Une voix d'une incroyable présence. Noddy pourrait être
placé aux côtés de vos Gillan et autres Plant comme
grand vocaliste britannique. Les deux premiers albums de Slade contiennent
également des morceaux égaux et similaires au Beatles. S'il
n'y avait pas eu le fait qu'ils soient skinheads à la base, le succès
aurait pu venir beaucoup plus tôt.
Le film attaque fort avec Dave Hill (guitare)
et Jim Lea (basse) dans un groupe avec Alan Lake (un acteur, loser par
excellence, jugez plutôt : Il a passé douze mois en prison
pour une baston entre poivrots, a joué dans des pornos soft comme
The Playbirds et s'est suicidé au fusil de chasse après la
mort de son actrice de femme Diana Dors), un croisement de crooner désespéré
entre Elvis et P.J. Proby. Ils jouent de la musique typique de mariage
qui se termine en total fight après que Dave Hill ait soulevé
la jupe d'une fille, tout en continuant de jouer, pour voir si elle portait
quelque chose en dessous.
Flame (c'est le nom du groupe dans le film)
reflète bien ce qu'était Slade avant le succès avec
un manager véreux et la rivalité avec un autre groupe. Noddy
chantait à la Screaming Lord Sutch dans un groupe appelé
les Undertakers (les fossoyeurs -ndt-). Durant un gig avec le groupe de
Lake en première partie, Noddy s'est fait enfermer dans son cercueil
de scène par Dave Hill, il s'en est suivi une poursuite acharnée
entre un corbillard et une bagnole au moteur surgonflé, culminant
en un accident et une nuit en cellule. Noddy et Jim sont devenus amis en
cellule et ça l'a amené à remplacer Lake aux vocaux
et à la formation de Flame.
Les mecs de Slade jouent leurs rôles
de façon authentique, ils ne cachent pas leur accent de prolo de
Birmingham. Même la copine de Dave Hill ressemble à s'y méprendre
à la typique et jolie poupée prolo 60's. Le film essaie de
montrer la réalité du circuit des concerts d'un groupe directement
issu de la classe ouvrière. Pour donner au film une atmosphère
encore plus 60's, Flame décida de faire une journée promo
dans une radio pirate sur un bateau. Où ils se sont joyeusement
fait tirer dessus. Il y avait une bataille navale permanente entre radios
pirates pendant les sixties .
L'intéret principal du film c'est
qu'il pointe du doigt la crasse hiérarchique des hautes sphères
du music-business et montre les farces publicitaires ridicules par lesquelles
les groupes devaient passer pour arriver au succès et le garder.
On commence par un documentaire assez cher et plutôt court, genre trop de parlote et pas assez de musique. Il n'y a pas un seul morceau présenté dans son intégralité, uniquement des extraits, et ça c'est pénible. J'aurais pourtant aimé aimer voir les versions complètes de "Over Under Sideways Down" (rebaptisée "Over And Under Sideways Down" sur la jaquette), "Happening Ten Years Time Ago" (avec Page et Beck aux guitares) et "Dazed And Confused". Peut-être Page leur a-t-il interdit d'utiliser intégralement les morceaux sur lesquels il joue... Il a ainsi récemment fait retirer de la vente les CD Cumular Limit, Live Yardbirds et Little Games qui sont bien sûr illico devenus des collectors.
Le batteur Jim McCarthy se moque de la coupe permanentée de Jimmy Page et on sent bien que le succès de Page avec Led Zeppelin leur a laissé un goût amer. Durant les interviews, Page et Clapton n'apparaissent jamais avec les autres membres du groupe. Seul Jeff Beck est assis avec eux pendant la séquence où ils rendent hommage à l'excellent jeu d'harmonica de Keith Relf (il est de notoriété publique que Page considérait Relf comme un ivrogne et un amateur). Les années Beck furent les plus créatives, innovatrices, et leurs productions d'alors ont toujours une forte influence sur les garage bands d'aujourd'hui, demandez aux White Stripes... Cette période est la mieux documentée ici. Beck descend le film Blow Up (sorti en 66) et affirme que David Bailey aurait mieux fait l'affaire que David Hemmings, ou que les Who auraient davantage convenu que les Yardbirds parce que le film parlait plutôt de cet univers-là.
Il y a aussi quelques très bons extraits live du Festival de Richmond (qui devint plus tard le Festival de Reading) en 65, les Yardbirds sont fringués comme les Beach Boys et font "For Your Love" et Hang On Sloopy". De la période américaine, le DVD montre le groupe jouant "Heart Full Of Soul" et "I'm A Man" en playback, avec des go-go danseuses ridicules en arrière-plan. Clapton a l'air du "petit gars bien peigné qui joue de la guitare", à part sur "I Wish You Would". Il a fait des merveilles avec les Yardbirds et ça a été récemment et substantiellement documenté à travers la sortie du CD The Yardbirds Live Blues Wailing July 64.
L'accent est mis sur la façon dont le bassiste Paul Samwell Smith fut à l'origine de "l'art du délire" pratiqué par le groupe . Je parle de ces moments où le tempo s'emballe brusquement au milieu d'un morceau et où chacun a l'opportunité de se lancer en libre improvisation. Un style tout droit issu de l'univers Jazz. Les Yardbirds l'ont popularisé mais c'est Led Zeppelin qui a poussé ça à son paroxysme. Peu de groupes ont aujourd'hui les capacités musicales de faire ça.
En conclusion, je dirai qu'un grand groupe
comme les Yardbirds mérite mieux que ça. Je suggère
que le groupe supervise un remake de ce DVD en y ajoutant des morceaux
entiers. Les Yardbirds méritent deux heures, pas cinquante malheureuses
minutes.
THE ROLLING STONES
Four Flicks (TGA), Ladies and Gentlemen (4 Reel),
The Stones In The Park (Granada), Gimme Shelter (The Criterion Collection
99), Marquee/Montreux Rumble (4 Reel).
Avec tout ce tintamarre autour de la sortie de Four Flicks, j'ai pensé que le moment était venu de rappeler que les Stones furent jadis sexy autant que grivois et que Keith Richards n'a pas toujours levé les bras en l'air pour s'auto-féliciter à chaque fois qu'il plaçait un lick à douze mesures. Son agaçant "nouveau style" laisse un vide béant dans les morceaux présentés sur Four Flicks.
Alors revenons plutôt à 1972 et à la version américaine du long bootleg (deux heures) Ladies And Gentlemen. Evitez la version italienne, c'est l'américaine qui a un son excellent. Les guitares sonnent vraiment et ils en jouent bien mieux que sur Four Flicks. D'ailleurs, Ron Wood n'a jamais fait mieux que Mick Taylor... Pour preuve il n'y a qu'à comparer les rythmiques sur "Bitch". Sur Ladies And Gentlemen Taylor écrase la version de Wood présentée sur Four Flicks. Ron Wood aurait dû rester avec les Faces et faire davantage de morceaux comme "Stay With Me".
Ladies And Gentlemen propose vraiment la crème de la crème des Rolling Stones de la période early 70's. Aucun autre film ne présente une telle expérience live et complète. Les versions de "Bitch", "Gimme Shelter", "Happy", "Tumbling Dice" et tout particulièrement "Midnight Rambler" sont en tous points supérieures à celles de Four Flicks. On ne peut pas non plus passer outre la "valeur esthétique" de Ladies and Gentlemen. Keith y est fringué comme un Hellacopter (ou alors ce sont les 'Copters qui s'habillent en Keith Richards de 72 ?) et Mick Jagger porte un maquillage outrancier (celui de Marc Bolan ?) autour des yeux. La façon dont il frétille du popotin au nez du public provoquera sûrement quelques émois chez les fans des Sailors, Turbonegro ou Village People. C'est bien en 72 que Jagger se tapait Bowie, ou que Bowie se tapait Jagger ? Enfin, qu'ils s'occupaient l'un l'autre quoi.
Keith a perdu ce look après s'être fait changer le sang et avoir arrêter de faire le junky (vous vous souvenez du clip promo de "Start Me Up" en 81 ? On dirait qu'il a deux cents ans). Sur Ladies And Gentlemen, Mick et lui ont encore l'air cool et Bill Wyman arbore une belle basse Dan Electro en plexyglass. Les Stones s'appréciaient toujours mutuellement en 72. C'est palpable sur la version de "Happy" où Jagger et Richards se partagent les vocaux. Alors que sur Four Flicks, c'est Keith tout seul qui chante le morceau tandis que Jagger quitte la scène. Pas très "Happy"...
Parmi les autres DVD's intéressants des Stones on peut bien sûr citer The Stones In The Park et le film Gimme Shelter. C'est d'ailleurs marrant de comparer les Hells Angels anglais dans Hyde Park avec leurs homologues américains de Gimme Shelter. Le concert gratuit de Hyde Park ressemble à une bande annonce pour le futur Woodstock. Tout n'y est que paix, amour et papillons, les Hells Angels s'éclatent gentiment sur "Sympathy For The Devil" (bien sûr) et la scène est pleines de percussionnistes noirs. Un sacré contraste avec ce qui allait se passer six mois plus tard à Altamont.
Il manque toutefois dans Hyde Park un truc typique de la "youth culture" de l'époque en Angleterre : les skins qui zonaient en périphérie du concert et écrasaient sauvagement les papillons lâchés pendant que Jagger lisait, en hommage à Brian Jones, le poème de Shelley. Hyde Park marque aussi les débuts de Mick Taylor avec les Stones, il est désaccordé la plupart du temps mais ça donne au film un son plus vrai et plus contemporain. On y trouve aussi leur meilleure version live de "Honky Tonk Woman". C'est vraiment dommage que seul un extrait de "Midnight Rambler" soit proposé ici parce que ça avait l'air d'être une putain de version rentre-dedans. Peut-être qu'une future réédition du DVD réparera ça un jour, en bonus track par exemple...
Le problème sur Gimme Shelter c'est ces hippies chiants comme la pluie, The Jefferson Airplane, qui ont joué avant les Stones. M'étonne pas que les Hells Angels leur aient éclaté la gueule (j'aurais fait pareil). Les organisateurs auraient dû faire passer Steppenwolf à la place et il n'y aurait pas eu de mort ce soir-là. Parmi les grands moments de Gimme Shelter, citons la version de "Jumpin' Jack Flash", Tina Turner caressant son micro comme s'il s'agissait d'une bite et la grosse fille à poil qui essaie désespérément de grimper sur scène.
Les Hells Angels ont bien sûr récolté leur lot d'opprobre et problèmes en tous genres pour avoir poignardé un mec à Altamont, mais le film montre bien que le type avait un flingue. Il aurait sans doute tiré sur Jagger si les Hells ne l'en avaient pas empêché. Ils ont fait le boulot pour lequel ils étaient payés : assurer la sécurité des Stones. Ils devaient aussi s'occuper des hippies défoncés au LSD qui s'écroulaient sur leurs sacro-saintes bécanes. On aurait dû appeler le film Sympathy for the Hells Angels.
Et pour finir la rubrique Stones, signalons un autre DVD bootleg, The Marquee/Montreux Rumble édité par 4 Reel, la même boîte qui a sorti Ladies And Gentlemen. Le mec de la boutique où je l'ai acheté m'avait assuré que le son était de qualité excellente. Malheureusement ce n'est pas le cas. La première partie montre le groupe en répétition à Montreux avant la tournée US de 72. Il y a deux versions de "Tumblin' Dice" et la voix de Jagger est tellement sous-mixée qu'on l'entend à peine. On dirait en plus qu'ils tiennent une sacrée gueule de bois, il n'y a guère que sur "Shake Your Hips" qu'ils s'en sortent.
La seconde partie du DVD propose huit morceaux en public au Marquee en mars 1971. Le mixage est loin d'être aussi bon que sur Ladies And Gentlemen, le groupe a toujours la gueule de bois et ne tourne qu'à demi-régime. La voix de Mick Jaguar explose dès le troisième titre et il continue plus ou moins aphone jusqu'à la fin du mini-set. S'il faut sauver un morceau, disons que "Satisfaction" bénéficie in-extremis d'une bonne injection de feeling.
Sur la troisième partie, l'éditeur présente le passage du groupe à Top Of The Pops avec "Brown Sugar". La voix est live et le "backing track" est différent du single. Jagger réalise une performance mémorable. A la suite vous trouverez une interview de Jagger et Wyman par Dick Cavett et des mauvais mix de morceaux live. Et ça se termine par une version promo inédite de "Loving Cup".
De tous ces DVD's live, Ladies And Gentlemen
est le meilleur et mérite d'être pisté.
THE CRAMPS
Live at Napa State Mental Hospital.
(Target DVD)
Ce petit film en noir et blanc restitue
bien ce qu'étaient les Cramps à leurs débuts. Brian
Gregory est là, c'est d'ailleurs le seul à s'afficher ostensiblement.
Poison Ivy semble un peu plus repliée sur elle-même, peut-être
effrayée par les timbrés de l'hôpital psychiatrique,
et ses arguments sexuels n'étaient pas encore très développés
à cette période. Par contre, Lux s'adapte parfaitement à
l'ambiance et c'est difficile de remarquer une quelconque différence
entre lui et les malades. Son style énergique "Elvis de l'Enfer"
contamine totalement les timbrés qui commencent à s'agiter
et entament des danses de zombies. Ils chantent même plus fort que
lui et envahissent rapidement la scène (je suis sûr d'avoir
reconnu Jeff Mead, l'ancien bassiste des Cannibals, il dansait à
gauche sur la scène). Les Cramps étaient FAITS pour ce genre
de public et ils se sont rencontrés pour une vraie histoire d'amour
! Le grand moment du show reste sans conteste la version meurtrière
de "Human Fly". Les textes reflètent bien ce qui se passe dans la
tête de ce public si spécial et, juste après, "Love
Me" fait office d'étrange et surprenante séance de télépathie.
Le public hurle et réagit pile-poil aux bons endroits. Je trouve
assez génial d'être timbré et de pouvoir crier à
tue-tête quand l'envie t'en prend.
Le reste du DVD, tout aussi bargeot, présente
des petits films promos de Target, l'éditeur. Il y a par exemple
un clip de Crime où ils sont tous habillés en flics et jouent
devant des taulards, à la fin deux prisonniers s'essaient violemment
aux percussions avec ce qui leur tombe sous la main, amortisseurs de bagnoles,
jerrycans d'essence, etc... Tout ça génère évidemment
un putain de bordel qui rend cinglé. Celui-là fera un cadeau
idéal pour tout dépressif de votre entourage.