TRAVOLTAS
Endless Summer
Radio
Blast
Ces Hollandais de Tilburg sont en constante
et réjouissante évolution depuis l'album produit par Marky
Ramone il y a quatre ou cinq ans. Ils sont devenus quelque chose comme
des maîtres ès "Power/Pop/Surf", une sorte de version européenne
des Demonics en plus "Pop carillonnante". Leur LP Endless Summer résonne
de belles et grosses guitares, de voix sublimes forgées par de multiples
écoutes du Greatest Hits des Beach Boys et déroule des historiettes
émouvantes et éternelles où le soleil et la mer effacent
le béton et la morosité des grandes villes sous la pluie
("Endless Summer", le morceau qui donne son titre à l'album, aurait
fait une évidente B.O. pour le road-surf movie du même nom).
Ajoutez-y une désopilante et enflammée déclaration
à Liv Tyler ("Je t'ai vue l'autre soir dans un film, tu ne dois
pas t'en souvenir... Hé Liv Tyler, si tu sortais avec moi, je t'offrirais
bien plus que tous ces prétentieux poseurs du show-bizz), des mélodies
facilement entonnables, un entrain rock'n'roll jamais démenti et
vous voilà avec un album trois étoiles réécoutable
ad lib.
Radio Blast Rds : Hildegardstr.13, 44809 Bochum, Allemagne (www.radioblastrecordings.de)
Les mêmes Travoltas viennent de repousser
les limites des habituels hommages en enregistrant quasiment live et acoustique
un CD intitulé Travolta's Party (les frères Wilson avaient
pondu un brillant Beach Boys Party dans les mêmes conditions). Soutenus
par quelques copains venus faire la claque (et les percussions sur des
bouteilles de bières), les Travoltas ont sélectionné
et enregistré quelques-uns de leurs titres les plus adaptés
au traitement ("Do The Gal-I-Gator", "Endless Summer", "Alright"...) et
plusieurs classiques des BB's ("Little Honda", Barbra Ann", "California
Girls"...), soit quatorze titres qui ont contribué à rafraîchir
notre été (on entend presque le clapotis des vagues du Pacifique
léchant le sable californien).
Knock Knock Rds : 394 Hewlett Ave,Patchogue, NY 11772. USA (www.knockknockrecords.com)
SMUT
PEDDLERS
10 Inch
Dead Beat Rds
Les Smut Peddlers terrorisent la Californie du Sud
depuis une dizaine d'années (et trois albums) et leur détermination
ne semble pas faiblir si on en juge par leurs derniers méfaits,
un 25cm (finement intitulé Ten Inch, rien à voir avec le
format du disque, c'est une belle braguette qui orne la pochette...). En
gros ça nous fait penser à un cocktail inédit Onyas/Turbonegro.
Du Death-Punk'n'Roll en quelque sorte. Le chanteur, soutenu par des choeurs
virils, crache à débit tendu, entre prêche virulent
et chant incantatoire. Le son de guitare de Sean "The Duck" Mallard est
"gros" sans pour autant donner dans le hard'n'heavy, des petits solos vicieux
fouaillent les tripes genre "je nettoyais ma gratte et le coup est parti
tout seul" et de toute évidence le groupe maîtrise le sujet
"fast, loud and violent" sur le bout des doigts. La voix de John Ransom
est marquante (on dirait parfois Turbo-Hank) et disserte ironiquement sur
des histoires vécues (la psychose de l'hépatite C sur "Rebatron
Party"). Petit à petit, quasiment tous les morceaux (huit) de ce
10" acquièrent le statut de hits dans mon immeuble. Un critère
comme un autre... Et on entend régulièrement les Smut Peddlers
derrière les tarés du show télé Jackass, m'étonne
pas.
Dead Beat Rds : PO Box 283, Los Angeles, CA 90078, USA (www.dead-beat-records.com)
QUEERS/MANGES
Acid Beaters
Stardumb
Rds
Autant je suis assez peu excité par
les groupes pop-punk dits "de la troisième génération"
(Darlington, Apers,...), autant j'admire les "maîtres" de la deuxième
génération, les Queers, ceux qui dénichèrent
un jour la pierre philosophale unissant à jamais Beach Boys et Ramones
sur l'impeccable Don't Back Down. L'inusable Joe King est de retour avec
la 243ème formation des Queers et il y a encore une fois du beau
monde : JJ Rassler l'ex-DMZ, Odds et actuel Downbeat 5, Dangerous Dave
(de John Cougar Concentration Camp) et Dustin Watson, batteur de Dick Dale
& The Slacktones. Sur ce split-CD (avec les Italiens Manges), ils proposent
six covers, fidèles et persos à la fois, de quelques classiques
bien choisis : "Chewy Chewy", l'énorme hit bubblegum d'Ohio Express,
le "Sunday Morning" du Velvet, une version de "Wipe Out" à imposer
dans les écoles de batterie ou le sensible "With A Girl You" des
Troggs. Même anecdotique par nature (seulement des reprises...),
ce genre de projet touchera pourtant logiquement le coeur de tout amateur
d'orfèvrerie électrique et de confortable perfection vocale.
Les Manges font aussi six morceaux qui pâtissent forcément
et peut-être injustement de la comparaison, même si leur cover
(eux ils n'en font qu'une) nerveuse du "Surrender" de Cheap Trick est plus
qu'honorable.
(www.stardumbrecords.com)
ANTEENAGERS MC & FRIENDS
Damned, si nos contributeurs se mettent tous
à sortir des disques en même temps (JSG...), il va falloir
créer une rubrique spéciale qu'on confiera à notre
correspondant zimbabwéen. Essayons de rester objectif d'ici là...
Sous une présentation très "do it yourself" (photocopie
A4 collée sur pochette blanche), sans nom de label (s'en foutent...)
mais avec feuille de présentation à l'intérieur, cet
album, paru seulement en vinyle, est le résultat d'un joli complot
entre potes. L'idée de Laurent Bigot ("Larry B." pour les dames)
était de graver une face avec sept morceaux joués par son
groupe Anteenagers MC et une face compilant quelques groupes parisiens
amis présentant un titre de leurs répertoires habituels respectifs.
Ça s'appellerait Anteenagers & Friends... Les groupes contactés
ont évidemment tous acceptés... Sauf que, sans doute mûs
par un sens de l'humour à froid et sous l'influence du "lever de
coude" bien maîtrisé, ils ont dans le plus grand secret décidé
d'enregistrer chacun un morceau... d'Anteenagers MC (ou une de leurs reprises).
L'idée est allée discrètement jusqu'au bout (un exploit
vu qu'il y avait quand même huit groupes dans le coup !) et c'est
un Larry B ébahi qui a découvert la surprise toute chaude
sortie de l'usine de pressage. Voilà pour la petite histoire, passons
maintenant à l'identité des comploteurs : Les Dragueurs,
Blutt (plus Coronados que jamais avec une cover en Français de "99th
Floor"), les Terribles (marrants et ultra-swing "Larry" -pour les dames...-),
The Wangs ("Down In Amsterdam", reprise instru du titre des Raiders figurant
sur le single d'Ant. MC), Opération S (avec l'autre face du single
précité, en Français ici) , Frustration, Real Gone
Daddies et Men In The Moon.
Quant aux sept morceaux d'Anteenagers MC,
le cocktail est bien dosé, entre nostalgie fin 70's, hommage de
fans connaisseurs, humour british et revival new-wave/punk à la
Devo-Buzzcocks. Pas vraiment de hits "comme à l'époque" (quoique
"What's Wrong With You" et son très réussi côté
Stranglers...) mais une série de titres qui échappent à
l'ornière "blague pour initiés" grâce à l'option
"faits sérieusement sans se prendre au sérieux". Et les reprises
choisies (dont le "Dark White" de Music Machine") subissent le traitement
sans dommage et prennent même une dimension pas prévue par
leurs créateurs. Il y aurait donc désormais une AMC touch
?
POWERTRANE
Ann Arbour Revival Meeting
Real O Mind Rds
Et puisqu'on en est à évoquer la quintessence
du Motor City Sound, autant faire confiance aux acteurs historiques de
l'histoire pour passer un bon moment. Mesdames-messieurs, voici Powertrane,
une expérience live et rare, des retrouvailles sur les lieux du
crime, la mythique Ann Arbor. Les comploteurs ont tous leur carte d'agitateurs
soniques agréés : Scott Morgan (chant/guit), Deniz Tek (chant/guit),
Robert Gillespie (guit, alias "Le tronçonneur de Détroit",
co-fondateur du Rob Tyner Band, ex-Detroit Wheels), Ron Asheton (il joue
sur les cinq covers des Stooges balancées en fin de concerts comme
autant de grenades offensives), Andrew Frost (le batteur des Hydromatics),
Chris Taylor à la basse et Hyawatha Bailey au chant sur quelques
titres (ce gars-là a été élu "fils spirituel
d'Iggy" par le tout Detroit-qui-rocke, son groupe habituel s'appelle The
Cult Heroes). Les morceaux ont été enregistrés au
Blind Pig de Ann Arbor en avril de l'année dernière et le
résultat est conforme à l'idée qu'on pouvait s'en
faire d'avance : anecdotique certes (parce que live et uniquement composé
de reprises) mais éminemment plaisant, avec prévisibles embouteillages
de guitares aux carrefours où l'avenue "No Fun" croise le boulevard
"Hanging On", soit dix-sept titres piochés dans le répertoire
des Stooges, Birdman, Sonic's Rendezvous Band, Rob Tyner Band ou Hydromatics
et reliftés par un groupe d'énergiques vieux pirates en goguette.
Et comme le son est impeccable (même sur les parties à trois
ou quatre guitares), les Detroit addicts ultimes peuvent jeter aux orties
certains vieux bootlegs du genre, ce Ann Arbour Revival Meeting en remplace
avantageusement une bonne douzaine à lui tout seul. (Real O Mind
Rds : PO Box 63516, Philadelphia, PA 19147, USA -- www.realomind.com)
THE
SUPERSUCKERS
Motherfuckers Be Trippin'
Autre grosse claque du trimestre, Motherfuckers Be Trippin’ confirme
l’impression générale laissée par leur concert à
Bordeaux l’an dernier : les Supersuckers sont un putain de groupe avec
une putain de classe qui troue le fion. Houla, pardon, pardon, ça
doit être l'effet “motherfucker” et autres “motherfuckin'” qui ponctuent
tous les trois mots leurs notes de pochettes... Depuis l’album La Mano
Cornuda (à part l’intermède pur country du double LP Must
Have Been Live) ils ont mis au point une formule diablement efficace :
un gros son riffu, des vocaux chiadés et des guitares flamboyantes
sur des mélodies mémorables fleurant bon la country et la
pop. Avec des atouts de poids dont le charismatique chanteur / bassiste
Eddie Spaghetti et une paire de gratteux redoutables. On pensait que le
précédent, The Evil Powers Of Rock’n’Roll, était leur
grand-oeuvre, ce dernier opus est peut-être encore meilleur, démarrant
en trombe par deux brûlots punk rock et un trip power pop-country,
“Pretty Fucked Up”, un de nos tubes de l’été. Le reste enfonce
le clou, parfois à la masse (“Fight Song” ou le fulgurant “Damn
My Soul”), parfois plus subtilement (“Sleepy Vampire”). Ces cowboys malpolis
savent écrire de bons morceaux, ils en pondent même des grands.
Espérons qu’ils feront mentir le titre qui ouvre l’album : “Rock’n’Roll
Records Ain’t Selling This Year”.
www.supersuckers.com
THE
RIVERBOAT GAMBLERS
Something To Crow About
Gearhead
Rds
Une des grandes révélations du
moment vient de tomber sur le label de Mike Lavella, Gearhead Rds. Something
To Crow About est le premier album bluffant d’une bande de gamins originaire
de Denton, un petit bled du côté de Dallas, qui mixe un punk
rock hi-energy à la New Bomb Turks / B-Movie Rats / Candysnatchers,
des influences garage velues à la Superbees et du street punk mélodique
et héroïque. C’est Tim Kerr, l’habituel producteur maison d’Estrus,
qui est aux manettes et il les a habilement motivés en leur demandant
de jouer “comme s’ils venaient du Texas”. Ils se la sont donc joué
texanne, les aiguilles dans le rouge et débordant de cette énergie
rageuse souvent palpable dans les productions Tim Kerr. Ils ont épaté
les Dragons, autres nouveaux venus dans l’écurie Gearhead, lors
d’une tournée commune (voir interview dans ce numéro) et
semblent promis à un avenir plein de bruits et de fureur.
Gearhead, PO Box 421219, San Francisco, CA 94142 -- www.gearheadrecords.com
-- www.theriverboatgamblers.com
MENSEN
Oslo
Gearhead
Rds
Toujours chez Gearhead, le deuxième
album des Norvégiens Mensen peut décevoir au premier abord.
Une production beaucoup plus léchée et des morceaux moins
variés qui font d'abord regretter le côté rugueux et
les influences sixties du premier album. (Petit mystère au passage
: Nicke Hellacopter crédité comme producteur sur un sticker
apposé par le label n’est cité qu’au mixage sur les notes
de pochette). Il fallait certainement un léger temps de latence
pour ressentir les effets des réactions hormonales provoquées
par la voix de la chanteuse... La guitariste n’est pas mal non plus avec
ses petits solos incisifs... Et puis les morceaux sont bons, rapides, des
petites mélodies acidulées et des refrains qui accrochent,
une sorte de croisement Ramones / Blondie dans un garage scandinave...
Faut pas attendre la dix-huitième écoute pour réaliser
qu’Oslo City mérite une petite visite.
www.mensen-band.com
THE
COMPULSIVE GAMBLERS
Live And Deadly
Sympathy
C’était le premier groupe rassemblant
Greg Cartwright et Jack Yarber, au tout début des années
90, avant les Oblivians. Après le split du trio de Memphis, ils
ont reformé les Compulsive Gamblers, sortant deux albums sur Sympathy
et menant leurs propres projets chacun de leur côté (les Deadly
Snakes ou les Reigning Sounds pour Greg, les Tearjerkers et les Cool Jerks
pour Jack). Disparus de la circulation, ils ont resurgi l’an dernier le
temps de deux shows à Memphis et à Chicago dont on retrouve
les meilleurs passages sur le double album Live And Deadly à nouveau
fourni par Sympathy. Nos deux compères ont embauché un nouveau
gang limite big band (pedal steel, orgue, trompette), et envoient avec
conviction leur mixture roots à base de R&B, pop sixties, soul,
rock’n’roll et country. Une magnifique version de “Your Happiness” (avec
la voix vibrante de Greg bien mise en avant au mixage), des ballades country
désabusées (“Name A Drink After You”), des complaintes soul
prenantes (“Sour And Vicious Man”), quelques éclairs rageurs (“Pepper
Spray Boogie”) et du R&B fougueux (“Bad Taste” adapté des Bar-Kays),
un bon disque donc, qui se conclut par “Quit This Town” et son solo vindicatif.
Ils l’annoncent comme leur dernier, mais vu qu'ils ont déjà
fait le coup, on peut toujours espérer.
www.sympathyrecords.com
THE
COOL JERKS
Cleaned A Lot Of Plates In Memphis
Sympathy
On reste à Memphis avec les Cool Jerks
de Jack Yarber justement, à ne pas confondre avec leurs homonymes
allemands. Pour le coup, c’est même une alliance Tennessee / Mississippi,
puisque Jack est rejoint par deux ex-membres des regrettés Neckbones.
C’est Sympathy bien sûr qui se charge de leur premier album, Cleaned
A Lot Of Plates In Memphis. On reste aussi dans le même registre
roots, mâtiné des influences garage punk / Stones / Dolls
des deux Neckbones - sur lesquels planent aussi l’ombre tutélaire
des vieux bluesmen du Delta -, le tout sur un ton plus vigoureux. On retiendra
de grands moments de groove hypnotique (“Can’t Quit”, “Certified Fool”
et ses lignes de guitares entremêlées), de R&B lancinant
(“Man And A Woman”), de rock’n’roll foutraque (“Let It Go And Rock”, ou
“Skip A Beat” dans l’esprit du “Pepper Spray Boogie” des Gamblers), une
reprise respectueuse du “You Really Got A Hold On Me” de Smokey Robinson,
et l’incandescent “Memphis Blues Again!” qui ouvre l’album. Les fans des
Neckbones peuvent aussi traquer l’excellent deuxième album des Preacher’s
Kids du guitariste / chanteur Tyler Keith (voir les chroniques Get Hip
plus loin).
www.thecooljerks.com
THE
GROOVIE GHOULIES
Monster Club
Stardumb
Rds
Pour fêter l’arrivée de leur nouvelle
batteuse Scampi, les super-héros de Sacramento avaient projeté
de réenregistrer Appetite For Adenochrome, leur premier album (Crimson
Corpse Rds, 1989 - réédité plus tard par Lookout)
doté d’un son live en studio ultra-garage et d’un line-up très
différent (seul Kepi le chanteur/bassiste est là depuis le
début, sa copine Roach n’est à la guitare que depuis Born
In The Basement, le deuxième album). Ils ont légèrement
revu le concept en ne gardant que six titres du premier LP (“King Kong”,
“Don’t Go Out”, “Blood Beach”, “The Blob”, “Do The Bat”, “Lookout”) et
en y ajoutant le tube “The Beast With Five Hands” de Born In The Basement,
“50 000 Spaceships (Watching Over Me)” et “Running With Bigfoot” extraits
de World Contact Day (troisième album, premier des quatre sortis
par Lookout), “Devil Town” une cover de Daniel Johnston, tirée du
single Graveyard Girlfriend, “Pet Semetary”, la reprise des Ramones, et
“The Lizard King”, la seule nouvelle chanson, qui dénonce l’usurpateur
Jim Morrison. Le vrai “Roi Lézard” c’est Godzilla bien sûr.
Leur son pop-punk minimaliste est toujours un vrai bonheur : mélodies
entêtantes, pas de solo, la quintessence des early Ramones, même
si le mur de guitare toujours produit par le fidèle Mass Giorgini
est un peu moins massif que d’habitude. Au final, Monster Club, leur huitième
album, paru comme le précédent chez les Hollandais Stardumb,
est à la fois un clin d’oeil aux vieux fans, une belle collection
de vieux titres dépoussiérés, et une porte d’entrée
idéale vers leur univers punk psychotronique et poétique.
Le trio a signé sur Springman Rds pour la sortie US du disque et
continue à tourner sans relâche : cinquante dates en Europe
cet été.
Stardumb Rds, PO Box 21145, 3001 AC Rotterdam, Pays-Bas -- www.stardumbrecords.com
-- www.groovieghoulies.com
THE
WOGGLES
Ragged But Right
Telstar
Peu après avoir reçu le magnifique
nouvel album des Woggles, on apprenait la mort de leur guitariste George
Montague Holton III, alias “The Human Metronome”, à l’âge
de trente et un ans, des suites de complications liées au diabète.
Un personnage discret et sympathique qu’on avait hébergé
à deux reprises à Toulouse, un guitariste bourré de
feeling, au style franc et pêchu assez distinctif. Présent
dès les premiers EP, sa maladie l’avait obligé à faire
un break, mais il était revenu pour Wailin’..., Fractured et l’album
live, contribuant à faire du combo d’Atlanta les maîtres du
garage R&B. On se souviendra de lui allongé paisiblement sur
le trottoir pendant que sa superbe chemise de scène tournait dans
la machine du lavomatic. Ses parents ont demandé à ce qu’il
soit enterré avec un tee-shirt du groupe et sa sangle de guitare.
Salut, George.
Ragged But Right est un monument de garage
groove, coloré de garage folk, boosté par la verve du screamer,
le Professeur Jones, et la chaude guitare du “Métronome Humain”.
Enregistré chez Rick Miller des Southern Culture On The Skids, et
produit par leur vieux complice Jeff Walls (ex-Guadalcanal Diary / Hillbilly
Frankenstein), il est sorti sur Telstar, un label hélas aléatoirement
distribué chez nous. L’aventure des Woggles continue, en famille,
puisqu’après un interim assuré par Johnny Vignault (qui signe
un titre du nouvel album, “When The Sun Goes Down”), c’est Jeff Walls qui
a pris le relais. Ils ont d’ailleurs sous ce line-up réenregistré
et réarrangé deux de leurs morceaux pour la bande-son du
nouveau film de Jim McCarthy, Broad Daylight. Ils apparaissent aussi sur
Guitar Ace, le tribute à Link Wray sur MuSick, avec une version
de “Deacon Jones”, et ont sous le coude une cover des Small Faces (“Hey
Girl”) pour un tribute sur Twist Rds, une reprise d’un extrait de la bande
son de Beyond The Valley Of The Dolls, “Find It”, pour une compil’ sur
Blood Red Vinyl et un projet d’album de reprises pour Larsen. (Woggles
Secret HQ & Action Playset , PO Box 268, Decatur, GA 30031, USA
-- www.hostess.com/woggles
)
BORED !
Chunks
Full Toss
Ceux qui s’imaginaient que les triple albums
vinyles étaient obsolètes depuis les seventies chevelues
en sont pour leurs frais. Les Australiens Bored! ont toujours eu de sacrées
tignasses, remarquez, et un son plutôt velu. Et leur discographie
est suffisamment touffue pour remplir les six faces de Chunks, un best
of que vient de faire paraître le label australien Full Toss. Le
groupe est né fin 1986 lorsque Dave Thomas et Grant Gardner ont
commencé à jammer ensemble sur des morceaux des Stooges et
de Joy Division. Ils sortiront six albums sous différentes formations
jusqu’au milieu des années 90. Sur l’un des meilleurs, Take It On
You, la basse était tenue par Tim Hemensley, qui partira ensuite
fonder les Powder Monkees, et qui est mort cet été, apparemment
d’une overdose. Les nombreuses reprises figurant sur Chunks clarifient
d’entrée les influences : AC/DC, Rose Tattoo, les Saints, Rocket
From The Tombs, les Sex Pistols, Black Sabbath, les Troggs, les Dolls ou
le Velvet. Une louche de hard rock, une rasade de punk à l’australienne,
un poil de bruitisme déglingué, une sombre intensité,
des solos de guitare qui explosent les cadrans, un son agressif et sauvage...
On peut les voir comme des précurseurs du heavy punk, voir même
du stoner, ils ont en tout cas laissé leur empreinte sur la scène
punk des antipodes, des ONYAS aux Datsuns. Trente-huit morceaux et pas
grand chose à jeter, si on est un adepte des riffs épais
et du punk viril. (Full Toss, PO Box 4171 Richmond East, Victoria 3121,
Australie -- www.fulltossrecords.com)
THE
BLACK KEYS
Thickfreakness
Fat Possum
Thickfreakness, le deuxième album du duo d’Akron,
ne déparera pas au milieu des galettes de T-Model Ford et autres
RL Burnside, les vieux bluesmen du delta abrités par le label du
Mississippi Fat Possum. Ceux qui se sont envoyés le premier, The
Big Come Up, sont déjà au jus : c’est un groupe étonnant,
minimaliste forcément, au son clair et puissant, revisitant le blues
lancinant des ancêtres et le R&B le plus poisseux avec une batterie
au groove efficace, une guitare triplophonique majestueuse et une voix
prenante travaillée au bourbon. On les compare souvent aux White
Stripes, sans doute parce qu’ils sont deux, peut-être aussi parce
qu’ils ont un goût commun pour les riffs blues bien gras. Mais la
démarche des Black Keys est plus respectueuse des racines. On notera
une version délectable de “Have Love Will Travel”, au milieu d’une
bonne douzaine de perles dans l’esprit de leurs débuts.
Fat Possum Rds , PO Box 1923, Oxford, MS 38655, USA -- www.fatpossum.com-www.theblackkeys.com
JERRY SPIDER GANG
Chroniquer le groupe d’un autre Digger, tu parles
d’un cadeau. Plus d’une décennie qu’on traîne dans les mêmes
rades, j’les ai connus tout p’tits pensez-donc. Et puis c’est des sacrés
loulous, imaginez que je les charrie, ils seraient capables de m’obliger
à me travestir, de prendre une photo et de la mettre en couverture
d’un disque, comme ils ont fait pour Dimi D. Euh, bon... Ça va,
c’est pas de la daube. Après avoir écumé l’hexagone
et plusieurs contrées européennes, sorti deux albums et avalé
plus de drogues qu’un peloton cycliste, ils sont suffisamment sûrs
d’eux pour jouer avec leurs influences comme Turbonegro le faisait sur
Apocalypse Dudes. Outre les reprises des Saints (“Private Affair”) et de
Union Carbide (“Chameleon Ride”), Exile On Mainstream regorge d’hommages
appuyés et de clins d’oeil vers Turbonegro justement (“Chemicals”,
“Bilbo Drug”, “Casual Sex”), les Hellacopters (“One Day Or Another”), Rocket
From The Crypt (“Into The Dark Of The Night”), ou les Stooges (“Conspiracy”
- c’est un morceau de Speedy ça non ?). Une production futée,
un son heavy punk de la mort, des guitares qui niquent tout, comme on dit
quand on a bu un coup de trop en fin d’émission, et des morceaux
dont l’intensité grimpe jusqu’à la fin... l’ordonnance rock’n’roll
idéale, délivrée par Lollipop sous peu. Le JSG apparaîtra
aussi bientôt sur des tributes à Chuck Berry (avec “Come On”)
et aux Devil Dogs (“Higher The Heel”).
BLOODSHOT
BILL
Trash Addict
Encore un one-man-band, de Montreal cette fois,
et derrière ce patronyme digne d’un outlaw du Far-West se cache
encore un sacré lascar. Ancien membre des Guilloteens, il mène
The Hubcaps, un gang psycho garage qui m’a l’air de dépoter et qui
aime gâter son public en agrémentant à l’occasion leurs
concerts d’animations délurées : le classique concours de
“french Kiss”, le “strip karaoke” (?) et le “kiss my ass for a buck booth”
où chacun peut baisser culotte et se faire embrasser le cul pour
un dollar (on essayera de guetter leur nouveau CD Crazy Fever). Trash Addict
est son troisième CD en one-man-band (guitare / batterie, simultanément
et sans overdubs). La batterie fait “tchac poum tchac poum”, la guitare
est méchamment distordue, la voix encore plus, il halète,
rugit, ricane tel un redneck sous speed de Bilbao un soir de pleine lune.
Une bonne goulée de trashbilly country blues, entre Jack Starr,
Hasil Adkins et Lightnin’ Beatman. Ames sensibles et tympans fragiles s’abstenir.
www.bloodshotbill.com
SIN CITY SIX
Home Of The Brave
Locomotive Rds
Espagne toujours avec le second album des cinq Madrilènes
anglo-américains. Après le décès de leur chanteur
Lee Robinson, le contre-coup a été rude. Le groupe a mis
quelques mois à trouver un nouveau screamer, Rusty, lui aussi un
expatrié américain qui vit dans la capitale espagnole depuis
une vingtaine d’années. Selon Norah, guitariste, ses textes sont
excellents et sa voix profonde et tendue sied parfaitement à la
musique des Malasañeros... Un rock & roll assez classique (mais
pas ennuyeux pour autant) sur une base bluesy (Hound Dog Taylor, Sonny
Boy Williamson) transcendée à la manière d’AC/DC,
Aerosmith ou Dictators... Continuité donc, mais avec une classe
et un talent toujours intacts. (LP/CD Home Of The Brave - Locomotive Rds)
D’où croyez-vous qu’ils viennent avec
un nom pareil ? D’Autriche bien sûr ! Ah Ah ! De Carinthie plus précisément,
la province de Jorg Haider ! Mais je ne crois pas que ceux-là soient
invités pour animer les réceptions du Grand Wizard facho...
Ça déchire à tous les étages, le son est ultra-saturé,
compressé à mort, tout dans les aigus, avec comme résultat
une puissance de frappe incroyable... Vous trouvez que j’en fais trop ?
Foutez-vous ce premier album entre les oreilles et vous sentirez passer
l’électrochoc ! Une vraie tuerie garage-punk ! Quelque chose comme
des Hives sous dexédrine ou Sweatmaster s'attaquant au répertoire
de Zeke. La claque ! (LP/CD s/t - Swindlebra Rds, c/o Uwe Demel, Goethestrasse
22, 89312 Günzburg, Allemagne)
www.swindlebra.de / www.rodriguez.at
THEE
BUTCHERS’ ORCHESTRA
Drag Me Twice
No Fun Rds
Formé en 96, ce trio brésilien a sorti deux albums
au début des années 2000, Golden Hits by the Butchers’ Orchestra
et In Glorious Rock & Roll (ce dernier est produit par Dan Kroha des
Gories/Demolition Doll Rods). C’est une compilation CD de ces deux albums
qui est proposée ici. Si vous aimez les Oblivians, l’early JSBX
et plus généralement le garage minimaliste (deux grattes,
une batterie) sauvage et teigneux, ce disque est pour vous. Absolument
rien à jeter sur ces 29 titres sortis par les Argentins de No Fun
Rds récemment installés dans le Michigan. (CD Drag Me Twice.
No Fun Rds, Box 8154, Ann Arbor, MI 48107, USA -www.nofunrecords.com
JET
CITY FIX
Play to Kill
King Bee/Infect Rds
En v'là du lourd en v'là ! Les
six garnements de Jet City Fix ont été allaités à
Motley Crüe et Guns & Roses et adorent le punk (Social Distortion
en tête). ça donne un hard-rock&roll mélodique,
avec des passages poppies digne du pire groupe pour midinette... Et malgré
tout, trois ou quatre morceaux de très bonne facture, comme l’énervé
“The Fix” ou le boogie punk (Aerosmith meet Electric Frankenstein) “Fire
It Up”. Sur scène leur débauche d’énergie est énorme
et spectaculaire. Ah ah, ce bassiste qui prend des poses de pitbull en
rut, c'est quelque chose ! (CD Play to Kill, sur King Bee/Infect Rds, Box
1201, Tacoma, WA 98401, USA)
www.infectrecords.com /www.thejetcityfix.com
GHETTOBLASTER VOLUME 2
“Ghettoblaster”, c’est le nom de la meilleure
bière de la Motor City Brewing Works, une brasserie qui en 1995
a été la première à ouvrir à Détroit
depuis la prohibition. Or, le brasseur en chef, John Linardos est aussi
musicien et vieux pote de Jim Diamond, le producteur sorcier du nouveau
son de Detroit depuis une bonne dizaine d’année. Ghettoblaster c’est
aussi une compilation montée par nos deux acolytes pour célébrer
les noces du houblon et du rock'n'roll. Cinq ans après le premier
volume, ils proposent un nouveau tour d’horizon de la scène trépidante
et protéiforme de Motor City en une bonne quinzaine de groupes,
jouant un ou deux titres chacun, enregistrés lors d’une série
de concerts à l’intérieur de la brasserie elle même.
“Avec Ghettoblaster Volume One on avait apporté la bière
dans les studios, avec GB II on a installé le studio dans la brasserie”
résume sobrement (hmm) John. Les groupes ont joué au milieu
des cuves de fermentation, entourés de 20 000 litres de bière,
environnement rêvé pour une fiesta R'n'R.
Les valeurs sûres sont au sommet de
leur art : The Dirtbombs (leur nouvel album Dangerous Magical Noise, est
prévu en octobre sur In The Red), The Hentchmen, The Come On’s (on
attend avec impatience leur EP sur Larsen : The Come Ons Play Selections
From The Serge Gainsbourg Songbook 45, des covers de “Je T'aime... Moi
Non Plus” et “Sous Le Soleil Exactement”), The Paybacks ou Bantam Rooster
(Tom Potter, le guitariste / chanteur du duo prépare un album solo,
Party Planet Rising qu’il devrait sortir sous le nom de The Detroit City
Council sur Acid Jazz Records).
Parmi les confirmations : Ko & The Knockouts, Electric Six
(leur label ne voulant pas d’un original, ils offrent une cover de “I’m
A Demon” de Roky Erikson - “I am a demon and I love Rock’n’Roll”, ça
rappelera quelque chose aux fans de Sweatmaster), et surtout The Sights,
les héros de cette compil’ puisqu’ils ont droit à quatre
morceaux : “Send Your Loving To Me”, garage R&B musclé, “Don’t
Want You Back” power pop énergique à la Badfinger / Big Star
qui cache deux autres titres, une reprise des Small Faces (“What You Gonna
Do”) et un titre bluesy intense qui évoque les White Stripes.
On a aussi droit à de belles découvertes
comme Bogue (des garagistes teigneux adeptes du Diddley beat, qui viennent
d’enregistrer sous la houlette de Tom Potter), ou The Alphabet avec “You
Can Radiate”, un tube psychédélique ensorcelant, véritable
appel à la lévitation. En plus de notre copine Noëlle
Lothamer à la basse et aux vocaux sensuels, le line-up comprend
l’hyperactif John Nash qui joue aussi avec The Witches et The Volebeats
et vient de rejoindre Electric 6. Leur CD démo quatre titres confirme
qu’on tient là un brillant alliage pop / psyché / folk, qui
évoque le Velvet, Syd Barrett ou Big Star. Au sommaire encore, The
Buzzards (gang éphémère formé par Screamin’
Joe Burdick, ex-chanteur des Dirtys), Outrageous Cherry (de la pop délicatement
ouvragée), They Come In Threes (pop encore, plus psychédélique),
The Witches (avec un titre aux faux airs de “Lust For Life” et une sorte
de blues swampy - plusieurs disques à leur actif), Slumber Party
(des filles qui sonnent comme le Velvet avec Nico) et les presque vétérans
- plus de dix ans d’activité - The Volebeats, pop sixties aux effluves
country. (www.motorcitybeer.com)